3.1 Une colonie portugaise

C’est en 1460 que le navigateur Diogo Gomes prit possession de l’archipel au nom du Portugal, qui devint domaine de la Couronne, après que les droits portugais sur les îles eurent été consacrés par le traité de Tordesillas, en 1494. 

L’archipel servit d’abord de terre d’escale pour les navires portugais en route vers le Brésil. Puis il devint un important centre de la traite des Noirs vers l’Amérique, car le commerce des esclaves d’Afrique occidentale vers le Nouveau Monde transitait surtout par le Cap-Vert.

De plus, les colons portugais de l’archipel firent venir leurs propres esclaves du continent africain pour les faire travailler dans les plantations. C’est à cette époque que s’est constitué le créole capverdien.

Mais le peuplement de l’archipel fut relativement tardif, puisque São Vicente resta inhabitée jusqu’en 1727 et Sal, jusqu’en 1781. L’abolition définitive de la traite en 1866 et le détachement de la Guinée-Bissau en 1879 détruisirent l’économie des îles et entraînèrent une forte émigration vers les États-Unis (migration libre) et les colonies portugaises d’Angola et de São Tomé et Principe (migration forcée). 

Après l’abolition de l’esclavage, le portugais est resté la langue officielle dans la colonie, surtout comme langue de l’État, de la justice, de l’éducation et du commerce. Dans la culture coloniale, l’utilisation du créole restait un signe d’infériorité sociale. 

Contrairement à la Guinée-Bissau, à l’Angola et au Mozambique, le régime de l’indigénat ne fut pas appliqué aux îles du Cap-Vert. En effet, la population blanche ne résista pas à l’apparition de la malaria: les Métis et les Noirs assurèrent le fonctionnement des institutions, tant laïques que religieuses.  

Plus tard, les Métis capverdiens joueront un rôle important dans l’émancipation de la colonie, car à l’exemple des autres colonies portugaises d’Afrique, telles que l’Angola et le Mozambique, beaucoup de Métis étaient employés comme cadres dans l’Administration en raison de leur degré d’instruction plus élevé.

Pour l’heure, tout autonomie du pays était simplement impossible, car les conditions n’y étaient guère favorables  en raison des sécheresses du début du siècle (1903-1904, et 1914), du régime fasciste de la Métropole et l’arrivée au pouvoir des militaires en 1926 ainsi que la limitation de l’immigration aux États-Unis et en Europe.

En réalité, le Cap-Vert traversera l’une des périodes les plus sombres de son histoire, qui coïncidera également avec l’Estado Novo («Nouvel État») du dictateur António de Oliveira Salazar (1889-1970). Sous le régime de Salazar, les «chemises vertes», la police politique du dictateur, et le PIDE (Polícia Internacional de Defesa do Estado: la Police internationale de défense de l’État), réussirent à étouffer tous les opposants, tant au Portugal que dans les colonies. Les tortures et les déportations au Cap-Vert étaient couramment pratiquées. Au cours de cette période, toute immigration était interdite (dont l’Amérique) : Salazar avait envoyé des troupes dans toutes les colonies portugaises du continent africain, afin de contenir le nationalisme toujours croissant des peuples autochtones. PUis les famines successives (1941-1942, 1946-1948) tuèrent, selon certains historiens, environ 20 000 personnes (sur 150 000 habitants) dans l’indifférence générale, car le pays était fermé aux étrangers.

Néanmoins, beaucoup de Capverdiens réussirent à s’enfuir vers le Sénégal dans les années cinquante et soixante, pays qui, bien souvent, servait de relais pour l’Europe, surtout la France, les Pays-Bas et la Belgique.

C’est notamment dans ces trois pays que se formèrent la plupart des cadres du mouvement indépendantiste capverdien. Dans la colonie du Cap-Vert, le créole devint un symbole de la résistance face au colonialisme portugais.

En 1951, à l’instar des autres possessions portugaises, le Cap-Vert devint un territoire d’outre-mer.

Cinq ans plus tard, en septembre 1956, Amilcar Cabral, un ingénieur agronome capverdien mais formé à l’université de Lisbonne, fonda le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée portugaise (future Guinée-Bissau) et du Cap-Vert (PAICG). À partir de 1959, il s’engagea dans la lutte armée contre le colonisateur portugais.

Le mouvement prit une orientation nationaliste révolutionnaire et marxisante qui s’accentua en janvier 1973. La guérilla réussit à contrôler les deux tiers de la Guinée-Bissau, alors qu’au Cap-Vert le mouvement resta clandestin.

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