Chercheuse sur les droits de l’enfant, Elin Martínez? a procédé, ce jeudi, à la publication du rapport de Human rights watch dénommé « ‘Ce n’est pas normal’ : Exploitation sexuelle, harcèlement et abus dans des écoles secondaires au Sénégal ». Une enquête contestée par le ministre de l’Éducation nationale, Serigne Mbaye Thiam.

Dans cet entretien, elle apporte des éclaircissements sur les résultats du rapport avant de renseigner sur les trois recommandations clés faites au gouvernement sénégalais. Selon Elin Martínez, le ministre sait très bien que l’éducation à la sexualité à l’école est une demande qui n’est pas nouveau. Laquelle, dit-elle, figure dans la fiche technique internationale.

Le ministre de l’Éducation nationale, Serigne Mbaye Thiam a contesté, dans un communiqué, les conclusions du rapport de Human rights watch dénommé « ‘Ce n’est pas normal’ : Exploitation sexuelle, harcèlement et abus dans des écoles secondaires au Sénégal' ». Que répondez-vous ?

Oui, nous avons lu la réponse du ministre de l’Éducation nationale, Serigne Mbaye Thiam. Cependant, nous n’avons pas reçu directement le communiqué. En fait, au mois de décembre 2017, nous lui avons envoyé une lettre avec nos conclusions et nos recommandations. Mais jusqu’à présent, pas sa réponse. Donc, c’est intéressant d’avoir la réaction de Serigne Mbaye Thiam et comme toujours nous l’invitions à une réponse officielle surtout sur ce que le gouvernement va faire pour protéger les enfants à l’école. Notre rapport a montré qu’il y a des filles qui souffrent à l’école, qui sont exploitées et harcelées.

Donc, il faut réagir même s’il y a des structures de l’Etat qui sont en place. Nous nous sommes concentrés sur ça. Nous avons fait des enquêtes et nous l’avons félicité pour avoir un cadre de coordination des stratégies mises en place. Mais quand même, on s’inquiète parce que parfois ils n’ont pas tellement appliqué les mesures. Donc, même si le gouvernement dit qu’il a ses structures en place, des agents qui sont chargés des inspections médicales, il doit voir ce qui se passe dans les écoles.

« On exhorte aussi Serigne Mbaye Thiam à consulter la fiche technique internationale qui existe déjà partout par rapport au fait d’apprendre la sexualité dans les écoles. »


Pourtant, il y a des inspecteurs de l’éducation…

Comme notre rapport le souligne parfois, ça ne marche pas. Il y a des inspecteurs qui savent qu’il y a des cas d’harcèlements et d’exploitations sexuels qui ne portent pas plainte. Il y a des directeurs d’écoles aussi. C’est au ministère d’aller à la base, dans toutes les écoles, avoir des discussions avec ces agents et avec d’autres ministères pour vraiment savoir qu’est-ce qu’ils doivent faire pour protéger les enfants. Nous les encourageons à aller plus loin. Mais comme, on l’a dit, nous avons rencontré les représentants officiels du ministère de l’Éducation nationale cette semaine, on les a encouragés à répondre officiellement à notre lettre et à bien discuter de ce problème parce que pour nous, la meilleure recommandation, c’est de s’assurer que le ministère de l’Éducation nationale va protéger les filles et les garçons à l’école.

Également, la tutelle dit que votre rapport a pour but d’amener le Sénégal à introduire l’éducation à la sexualité dans ses curricula. Ces soupçons sont-ils fondés ?

C’est intéressant que le ministre ait souligné cela parce qu’il sait très bien que cela fait partie des discussions en l’Afrique et à l’international. Il y a beaucoup d’efforts qui sont faits à ce niveau par des agents des Nations-unis, les cadres des Ong, des gouvernements qui sont déjà allés plus loin pour s’assurer que les enfants ont l’accès à l’éducation de qualité sur la sexualité et à la santé de la reproduction. C’est n’est pas quelque chose de nouveau. C’est juste un rappel pour le gouvernement du Sénégal afin qu’il fasse des efforts dans ce sens.

Le ministre sait très bien que ce n’est pas seulement nous qui voulons ce programme. Car, les agents de l’Onu, de l’Uncesco, du Fonds de la population des Nations-unies ont tellement encouragé l’État sénégalais à faire cela. Je veux aussi souligner qu’au Sénégal, le ministère de la Santé fait beaucoup d’efforts pour garantir que les enfants sont protégés du Vih, des maladies sexuellement transmissibles à travers l’information. Donc, si ce département est en train d’agir de la sorte, le ministère de l’Éducation nationale doit s’assurer que ces élèves ont vraiment l’accès à l’information de qualité par rapport à la sexualité mais aussi à la santé de la reproduction. On exhorte aussi Serigne Mbaye Thiam à consulter la fiche technique internationale qui existe déjà partout par rapport au fait d’apprendre la sexualité dans les écoles.

« Il y a des enseignants qui harcèlent, qui exploitent et qui abusent ces élèves. Donc, ce n’est pas seulement pour le ministère de l’Éducation. Les syndicats d’enseignants aussi doivent réagir. »

Pourtant Serigne Mbaye Thiam a soutenu que la lutte contre les violences faites aux filles fait partie de l’une des priorités du gouvernement…

Nous avons souligné dans le rapport est que le gouvernement a fait deux choses. La première chose est qu’il a mis en place une stratégie pour améliorer l’éducation pour les enfants au niveau secondaire et assurer qu’il ait plus de filles à l’école. La deuxième chose est que le gouvernement est en train d’adopter certaines stratégies politiques. Mais, ce que nous avons relevé dans les recommandations, ce sont des faiblesses le système.

Nous avons remarqué que le gouvernement n’a pas une politique nationale pour prévenir l’exploitation sexuelle et le harcèlement sexuel à l’école. Cela n’existe pas même si dans les stratégies du gouvernement, ils ont déjà inclus des sujets par rapport à la violence basée sur le genre. Nous avons aussi souligné qu’il n’y a pas un code de conduite si bien que les enseignants ne sont pas guidés par un code de déontologie et d’éthique. Ceci n’est pas une obligation légale mais c’est une obligation déontologique. C’est quelque chose qu’eux-mêmes doivent respecter.

Cependant, comme on peut le voir, il y a des enseignants qui ne respectent pas cela, qui harcèlent, qui exploitent et qui abusent ces élèves. Donc, ce n’est pas seulement pour le ministère de l’Éducation. Les syndicats d’enseignants aussi doivent réagir pour adopter un code de conduite pour tout le personnel éducatif. Notre 3e recommandation clé est de donner une formation de qualité sur la protection de l’enfant et les droits de l’enfant. Ce sont les enseignants eux-mêmes et les syndicats qui nous l’ont vivement recommandée

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