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À Berlin, flambée de violences néo-nazies

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À Berlin, flambée de violences néo-nazies

Flambée de violences néo-nazies dans un quartier d’immigrés à Berlin. En juin et juillet, le quartier populaire Neukölln dans le sud-est de Berlin a été le théâtre d’une montée d’actes de violences néo-nazis. Quasiment quotidiennement, des voitures sont brûlées et des incendies sont volontairement provoqués.

Des immeubles sont aussi tagués de graffitis nazis. Ces actes inspirent de la crainte et de l’indignation à notre Observateur, qui estime que la police ne met pas la sécurité des habitants, dont de nombreux immigrés, au coeur de ses priorités.

Début juillet, un incendie a carbonisé la façade d’Al Andalos, un restaurant libanais du quartier de Neukölln. Deux personnes ont été blessées dans l’incident. Même si la police n’a jusque-là pas identifié de suspects, les habitants du quartier craignent que des membres de mouvements d’extrême-droite ne soient impliqués dans l’incident.

Parmi eux, de nombreux Libanais, Turcs et Syriens qui valent à Neukölln d’être connu comme un quartier d’immigrés et d’être la cible d’attaques d’extrême droite.

Mohamed Ali Chahrour est le porte-parole de Kein Generalverdacht (“Pas d’amalgame” en français), une association caritative locale qui lutte contre la xénophobie, le racisme et les violences policières à Neukölln.

Depuis le début du mois de juillet, nous avons été victimes d’agressions pratiquement toutes les semaines. Les violences s’accroissent parce que les auteurs jouissent d’une certaine impunité. Nous avons le sentiment que la police ne se sent pas réellement concernée.

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Les forces de l’ordre portent un jugement discriminatoire et stigmatisant envers les immigrés, disant que plus ou moins tout le monde est un potentiel criminel.

Mais beaucoup d’immigrés ont la nationalité allemande. À Berlin, il y a notamment près de 150 000 personnes d’origine arabe, qui font l’objet de beaucoup de méfiance.

Flambée de violences néo-nazies à Berlin

Cette vidéo montre des voitures calcinées devant Damaskus Konditorei, une boulangerie de Neukölln appartenant à un réfugié syrien.

Des symboles nazis ont été tagués sur le mur adjacent à la boutique. L’attaque s’est produite le 18 juin.Cette vidéo publiée le 19 juin montre les dégâts près de la boulangerie syrienne.

“Les nazis ont à nouveau terrorisé Neukölln la nuit dernière, en causant un incendie criminel et en inscrivant des tags nazis sur les magasins d’immigrés.

Encore une fois, cela se passe à moins de 100 mètres du poste de police. Les habitants de la Sonnenallee et de la Wildenbruchstrasse vivent dans la peur. La terreur de l’extrême-droite à Neukölln doit cesser.”, affirme cet internaute sur Facebook.

Le Sénat allemand estime que 130 crimes dans Neukölln ont été attribués au mouvement néo-nazis et à l’extrême-droite depuis septembre 2019.

Ces attaques se traduisent par des des croix gammées taguées, des saluts nazi, des voitures brûlées et des actes de vandalisme. Durant les sept dernières années, 2 800 incendies volontaires, suspectés d’être en lien avec l’extrême-droite, ont été reportés.

Cette vidéo montre l’incendie d’un appartement à Neukölln en 2019, elle a été envoyée par un témoin à la rédaction des Observateurs.

“La terreur ne vise pas juste des individus mais une ville toute entière”

Ferat Ali Kocak, militant antiraciste local et vice-porte parole du parti politique Die Linke (“La Gauche” en français), a observé ces deux dernières années une forte augmentation des violences d’extrême-droite dans le Nord de Neukölln.

Le terrorisme d’extrême-droite s’opère de façon ininterrompue depuis 11 ans à Neukölln, malgré le fait que les coupables soient connus. Mais, en 2018, cela a pris une nouvelle forme.

Auparavant, les nazis se concentraient davantage sur le sud du quartier, et attaquaient ou menacaient des individus seuls. Ces individus étaient de ceux qui militent dans les paroisses et soutiennent les réfugiés, qui ont une vision du vivre-ensemble diverse et pacifique, des gens comme le libraire Heinz Ostermann qui encouragent le travail de mémoire [sur l’Holocauste].

Dans le nord du quartier, les violences ne visent pas uniquement les individus mais la ville toute entière. La cible des attaques devient alors la communauté immigrée. Des voitures [appartenant à des immigrés] sont incendiées régulièrement, voire des immeubles. Il y a des tags nazis partout.

Par “petits délits” on entend par exemple le vols de Stolpersteine [des plaques métalliques à la mémoire des victimes de la Shoah ornant le trottoir, NDLR] ou le marquage de maisons.

Ferat Ali Kocak a publié la photo de cette affiche vandalisée le 23 juillet, elle honorait la mémoire des victimes du nazisme.Capture d’écran d’une story publiée par Ferat Ali Kocak sur Instagram.

À Berlin, flambée de violences néo-nazies

“Cela se passe aussi à Neukölln ! Des affiches ont été vandalisées ici, elles rendaient hommage à tous ceux qui ont été assassinés par les nazis depuis 1990.

Ferat Ali Kocak a lui-même a été la cible des néo-nazis. Il y a deux ans, sa voiture a été incendiée, selon lui par des personnes liées à l’extrême-droite. L’agence de renseignement allemande a confirmé que des néo-nazis avaient l’avaient suivi avant l’attaque.

Des néo-nazis m’ont suivi pendant un an et demi. La police était au courant mais ne m’a pas informé. Deux semaines avant mon agression, des nazis [dont un membre du Parti national-démocrate d’Allemagne et un autre du parti Alternative pour l’Allemagne, des partis ultraconservateurs et eurosceptiques, NDLR] m’ont suivi pendant un événement sur lequel j’avais communiqué sur les réseaux sociaux. J’ai été suivi jusque chez moi. Deux semaines plus tard, ma voiture a été brûlée.

Réseaux d’extrême-droite et méfiance envers la police

Dans de nombreuses régions d’Allemagne, l’extrémisme de droite repart à la hausse. En 2019, le gouvernement a comptabilisé 32 080 extrémistes “encartés”, contre 24 100 en 2018. Ce calcul comprend les membres de deux branches de l’AfD (le parti Alternative pour l’Allemagne) : la branche jeune “Junge Alternative”, et la branche identitaire “Der Flügel”.

De nombreux cas de violences d’extrême-droite sont le fait de poignées d’individus. “L’identification de petits groupes et de suspects individuels en particulier s’avère être un défi particulier pour les autorités”, affirme un rapport de l’Office fédéral de protection de la Constitution publié en 2019.

La police berlinoise est très critiquée pour son manque de rigueur dans la prévention des violences néo-nazies. Des enquêtes ont été menées au sujet des groupes néo-nazis au sein de la police allemande et, en 2018, des membres du parti d’extrême-gauche Die Linke ont reçu des menaces de mort contenant des données personnelles obtenues auprès de la police de Francfort.

Selon le journal Der Spiegel, ces menaces étaient étroitement liées à l’extrême-droite. Le 14 juillet 2018, le directeur de la police du Land [état fédéré allemand dont Francfort est la capitale] de Hesse, Udo Münch, a démissionné suite à l’enquête du procureur.

Pour Ferat Ali Kocak, ces affaires signifient que la police n’est pas digne de confiance quand il s’agit d’arrêter efficacement la violence d’extrême-droite et les néo-nazis.

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Il ne s’agit pas de se méfier de toute la police. Pour nous, il est important de séparer les bons des mauvais. Ceux qui ont une mentalité d’extrême-droite devraient être suspendus. Ainsi, ceux qui font bien leur travail pourront regagner la confiance des citoyens.

Leo W., qui a souhaité témoigner de façon anonyme, a partagé des photos avec la rédaction des Observateurs de France 24 qui montrent des affiches placardées à Neukölln, elles montrent des néo-nazis connus des habitants du quartier. Il affirme que l’identité des personnes ayant collé ces affiches n’est pas connue.

J’ai vu ces affiches un peu partout à Neukölln, la photo a été prise sur Wildenbruchstraße, devant le Sahara Imbiss, un restaurant soudanais qui sert des falafels. Quelques affiches ont été arrachées, ce qui suggère que les nazis essaient d’interrompre cette campagne de dénonciation.

Cette photo montre l’une des affiches vandalisées, arrachée d’un mur à l’extérieur de la station de U-Bahn Rathaus à Neukölln.

Ferat Ali Kocak craint que ce ne soit pas pas suffisant :

“Faut-il qu’il y ait un Hanau [une fusillade xénophobe survenue en 2019 à Hanau, en Allemagne, NDLR] avant qu’une voix ne s’élève ?”

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