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La Côte d’Ivoire rend un dernier hommage à DJ Arafat, le roi du coupé-décalé

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La star ivoirienne du coupé-décalé DJ Arafat, décédée brutalement dans un accident de moto le 12 août, doit être inhumée samedi. Plus de 100 000 personnes sont attendues aux funérailles qui ont débuté vendredi à Abidjan.

Dans les rues d’Abidjan, la capitale ivoirienne, l’émotion est toujours vive, vendredi 30 août, près de trois semaines après le décès accidentel de l’icône du “coupé-décalé” DJ Arafat, de son vrai nom Ange Didier Houon, à l’âge de 33 ans.

Avant son inhumation, samedi, à Williamsville, au nord d’Abidjan, les “Chinois”, surnom donné à ses millions de fans qui le suivaient sur les réseaux sociaux, rendent un hommage exceptionnel à celui qui a révolutionné la musique ivoirienne.

Un concert géant ponctué de témoignages et d’allocutions a débuté dès 10 h, vendredi, au stade Houphouet Boigny, censé accueillir la Coupe d’Afrique des nations en 2023. Les 35 000 places de l’enceinte sportive n’ont pas suffi à contenir l’influence dont jouissait l’artiste auprès de la jeunesse ivoirienne.

« Nous attendons 100 000 personnes pour les funérailles musicales qui débutent vendredi », avait déclaré plus tôt dans la journée Kenzo Kouadio, le président du comité d’organisation des funérailles du « Père des Chinois ». Des écrans ont donc été installés aux abords du stade pour diffuser la cérémonie en direct ainsi que sur la chaîne nationale ivoirienne RTI.

De nombreuses stars du monde artistique dont les Congolais, Koffi Olomidé et Fally Ipupa ou les Nigérians Davido et G Martins étaient attendues. L’État ivoirien a, lui, décidé de prendre en charge le coût des funérailles.

“Un héritage musical sans précédent”

DJ Arafat a  dominé pendant quinze années le mouvement musical du coupé-décalé jusqu’a en devenir l’un des plus grands ambassadeurs en Afrique. En témoignent les nombreuses récompenses musicales internationales qu’il arborait fièrement. “DJ Arafat a vécu dans la rue. Il s’est fait tout seul. Jusqu’à être le porte-flambeau du coupé-décalé, des artistes ivoiriens. C’est vraiment à féliciter. Ce n’est pas tout le monde qui arrive à faire cela”, explique le rappeur ivoirien Terely sur France 24.

Né le 26 janvier 1986 dans le quartier populaire de Yopougon, l’enfant terrible du coupé-décalé qui compte parmi les artistes les plus populaires de l’Afrique francophone a grandi dans une famille de musiciens. Les relations avec sa mère sont tendues. Tina Glamour, chanteuse ivorienne au faîte de sa gloire dans les années 1990 était controversée en raison du caractère jugé “obscène et vulgaire” de ses prestations scéniques. 

Très tôt, DJ Arafat quitte les bancs de l’école et préfère les soirées endiablées des maquis de la célèbre rue Princesse de Yopougon, connue pour ses mondanités, où il offre ses prestations de DJ. C’est en 2003 qu’il se révèle au public avec son premier tube “Hommage à Jonathan”, un autre grand nom de la scène ivoirienne décédé.

S’enchaînent alors les succès comme ‘’Kpangor’’ (2005), Djessimidjeka (2012), Maplorly (2015) ou Dosabado (2018), qui sont tout autant des concepts de danse que “le commandant Zabra”, un autre de ses nombreux surnoms, crée.

Juste avant sa mort, DJ Arafat faisait la promotion de “Moto-Moto”. Le clip a été vu près de 6 millions de fois sur YouTube.

“DJ Arafat a révolutionné le coupé-décalé en mélangeant les sons, les rythmes. Il s’est par exemple inspiré de musiques traditionnelles africaines, mais aussi de l’afrobeat nigérian, du rap, du baile funk brésilien. Il était aussi un danseur exceptionnel et a associé à sa musique des concepts de danse nouveaux”, a expliqué Franck Alcide Kacou, directeur label d’Universal Music Africa, la maison de disque qui produisait DJ Arafat depuis 2013 au Monde. “L’artiste laisse un héritage sans précédent. Je pense qu’il va y avoir un avant et un après DJ Arafat”, ajoute-t-il sur France 24.

Personnage “fantasque”

Malgré le succès fulgurant de l’artiste et les millions de vues cumulées par ses vidéos sur YouTube, le personnage “fantasque” selon les mots de Claudy Siar, producteur de l’émission Couleurs tropicales sur RFI ne faisait pas pour autant l’unanimité.

Féru de « bad buzz », susceptible et trop excessif, il n’avait de cesse d’haranguer ses cinq millions de fans sur les réseaux sociaux avec des clashs contre d’autres rivaux de la scène musicale ou même d’anciens poulains épaulés à l’image de Safarel Obiang, Ariel Sheney, figures montantes du coupé-décalé ou encore Serge Beynaud, Debordo Leekunfan.

Mais pour ce dernier avec qui DJ Arafat a partagé des scènes en début de carrière, la rivalité n’était que “virtuelle”. “Je suis choqué. Je n’arrive pas à y croire. Le virtuel et la réalité sont deux mondes différents. DJ Arafat n’a jamais été mon ennemi. C’est un frère. Nous avons partagé plein de trucs”, avait confié Debordo Leekunfan sur un plateau de la télévision ivoirienne au lendemain de la mort de l’artiste.

Pour Claudy Siar, interrogé sur France 24, “DJ Arafat s’émancipait de tous les codes, de toutes les bonnes manières que vous impose parfois l’industrie du disque, le monde artistique, voire  même les médias. Il a vécu son rêve jusqu’à la folie. Il était provocateur, il n’hésitait pas à vouloir faire le buzz. Il transgressait tout le temps. Il n’arrêtait pas d’avoir un clash avec tel artiste, tel groupe. Et nous, on suivait ça. Mais c’était DJ Arafat”.

Les réseaux sociaux avaient aussi été témoins de ses nombreuses frasques comme cette vidéo dans laquelle, en état d’ivresse, il avait brisé une assiette sur la tête de sa compagne d’alors la soupçonnant de l’avoir trompé.  

“C’était quelqu’un qui avait un bon cœur et que beaucoup de personnes n’arrivaient pas à comprendre” estime Abib Marouane sur France 24, l’un de ses managers. “Il a toujours été là pour la Côte d’ivoire, pour l’Afrique. Il a fait danser les gens. C’était quelqu’un de bien avec ses qualités et ses défauts”.

Des défauts que visiblement ses fans sont prêts à lui pardonner au regard de l’hommage national que la Côte d’Ivoire lui rend. Il semble que pour la postérité le pays ne veut garder que l’image de l’artiste national, qui a réussi à égayer les cœurs et à offrir de la joie pendant les années sombres.

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