Les modèles de Communication: Retour sur les basiques de la communication... 7Communiquer c’est établir une relation avec une ou plusieurs autres parties. Mais pour communiquer nous devons être familiarisés avec les différents facteurs qui interviennent dans le processus de communication. Si nous en avons une bonne perception, ces facteurs aident à mieux planifier, à mieux aborder, à mieux analyser… bref à mieux communiquer. Il existe bon nombre de schémas qui décrivent un processus de communication, il m’apparait opportun de revenir sur les principaux car ses schémas représentent la base de toute communication.

D’Aristote (± 350 avant JC) à Riley (1965), la communication a été théorisée à l’aide de schémas; les modèles de communication revêtent diversent formes, du résumé le plus simple au diagramme mathématique pointu. Aujourd’hui encore, beaucoup n’appréhendent pas encore l’importance de la communication, en fait communiquer c’est comme respirer : on ne peut pas ne pas le faire ! La communication est l’élément essentiel à tout échange qu’il soit professionnel ou privé.

1° Le Modèle d’Aristote (± 350 AJC)

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Le philospohe grec a établi le premier vrai modèle de communication orale qu’il a baptisé rhétorique. Dans ce modèle, l’art oratoire repose sur trois éléments : l’éthos (le style que doit prendre l’orateur pour capter l’attention de l’auditoire), le logos (la logique, le raisonnement, l’argumentation) et le pathos (la sensibilité de l’auditoire). La communication selon Aristote repose donc sur une forte charge émotionnelle, l’auditoire doit être séduit ou charmé sinon il fermera la communication. En fait, dans le modèle d’Aristote, c’est celui qui est en bout de chaîne – le récepteur – qui détermine l’objet et la fin de la communication, si l’objet ne lui convient pas, il mettra un terme à la relation. Il est, sommes toutes, l’élément majeur du processus de communication.

2° Le Modèle de Shannon et Weaver (1948)

Publié dans Théorie mathématique de la Communication (1948), de Claude Shannon et Warren Weaver.
Publié dans Théorie mathématique de la Communication (1948), de Claude Shannon et Warren Weaver.

Il s’agit d’un modèle linéaire simple dans lequel la communication est réduite à sa plus simple expression, c’est aussi le premier schéma moderne de la communication. L’émetteur (source) envoie un message codé à un récepteur (destinataire) qui le décode dans un contexte parasité par des bruits extérieurs. Ce schéma trouve son origine dans les travaux de décodage des communications ennemies menés par Shannon durant la seconde guerre mondiale. Ce que Shannon nomme bruitcorrespond en fait au brouillage des messages codés, c’est Weaver qui transforma cette notion et l’adapta à la communication de base entre deux parties. Ce modèle de communication fait référence mais il présente de nombreuses lacunes, il ne tient en effet compte que d’un seul récepteur, d’un seul message et ne prend en compte le parasitage qu’au seul niveau du canal de communication sans tenir compte du parasitage au niveau de l’émetteur ou du récepteur.

3° Le Modèle de Lasswell (1948)

Publié dans Structures et fonctions de la communication dans la société (1948), de Harold Dwight Lasswell
Publié dans Structures et fonctions de la communication dans la société (1948), de Harold Dwight Lasswell

Lasswell est assurément l’un des pères de la communication moderne, c’est lui qui en a défini le principe fondamental de 5W (Who say What to Whom in Which channel with What effect ? => Qui dit Quoi à Qui par Quel canal et avec quel effet ?). En fait, ces cinq questions fondamentales sont issues en droite ligne de la Rhétorique selon Quintilien, un professeur de rhétorique latin du premier siècle après JC. Le Modèle de Lasswell entrevoit la communication comme un processus d’influence et de persuasion (à l’image de la publicité qui se développe d’ailleurs très fort à l’issue de WW2). Il dépasse la transmission simple du message pour s’attarder sur les étapes de la communication, la pluralité potentielle des émetteurs et des récepteur, les enjeux et les effets de la communication. Cependant, Lasswell néglige la notion de rétroaction (feedback) tout comme les aspects psychologiques et sociologiques d’une relation. Dans ce modèle, le récepteur reste passif et n’a pas un rôle primordial, à l’inverse du Modèle d’Aristote. On peut critiquer le Modèle de Lasswell en disant qu’il s’apparente davantage à un modèle de propagande que de communication globale.

4° Le Modèle de Newcomb (1953)

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Dans son modèle aussi appelé ABX, Theodore Newcomb ajoute une dimension sociale et psychologique à la communication. Il n’y a plus d’émetteur ou de récepteur, mais bien des communicateurs qui émettent ou recoivent dans une interaction. Newcomb distingue deux paramètres qui influent sur la relation sociale qui est nécessairement liée à la communication : l’attitude et l’union. L’attitude est l’aspect affectif de la relation, l’union est la spécificité de la relation. Newcomb insiste sur l’équilibre ou le déséquilibre de la relation sociale; l’équilibre est atteint lorsque les attitudes ont la même orientation. Pour qu’il y ait communication il faut que les parties soient à la recherche de cet équilbre, s’il n’est pas atteint, il convient de réduire au maximum le déséquilbre ou de rompre la communication. Newcomb précise encore que les relations se nouent forcément autour d’un objet (thème) commun et que toute situation de communcation met en exergue des individus par leurs attitudes. Il déclinera son modèle en huit sous-modèles, quatre à l’équilibre et quatre déséquilibrés.

5° Le Modèle de Gerbner (1956)

Publié dans Vers une théorie générale de la communication (1956) thèse de Doctorat en communication présentée à l'Université de Californie du Sud par George Gerbner
Publié dans Vers une théorie générale de la communication (1956) thèse de Doctorat en communication présentée à l’Université de Californie du Sud par George Gerbner

Futur Professeur de télécommunication et futur Sociologue, George Gerbner présente un modèle général de la communication qui s’articule sur deux axes essentiels : le message est lié au contexte (et donc celui-ci permet de renseigner sur le message) et le processus de communication repose sur deux dimension, la perception et le contrôle du message. Gerbner lie la communication à la culture et la culture à la télévision, persuadé que celle-ci servira rapidement de vecteur. Le Modèle de Gerbner est plus complexe et s’adapte à la communication interpersonnelle qu’à la communication de masses.

6° Le Modèle de Berlo (1960)

Publié dans Les processus de communication (1960) par David K. Berlo
Publié dans Les processus de communication (1960) par David K. Berlo

Théoricien de la communication, David K. Berlo a mis en évidence l’importance de l’aspect psychologique de toute communication. Son modèle est simple,  Source – Message – Canal – Récepteur, mais la communication est influencée par des éléments extérieurs à chaque niveau de la relation. Ainsi, interviennent, notamment, le savoir, le sytème social, les compétences et la culture de l’émetteur et du récepteur, la façon dont le message est traité, son codage, sa structure ou encore, d’un point de vue physique, les cinq sens. Berlo présente un modèle qui s’adapte à la communication interpersonnelle et à la communication de masse puisqu’il définit la source et le récepteur comme pouvant être une personne, un groupe de personne, une organisation ou une institution. Ce modèle est nettement plus abouti puisqu’il tient compte de la personnalité de la source et du récepteur, de leurs connaissance, de leurs compétences, de leur environnement… Berlo évoque aussi le codage en tant que comportement (gestes, postures…) et qu’expression autres que le langage (danse, musique, art…). Il retient que, quel que soit le codage, c’est lui qui rend une communication simple ou compliquée… ou qu’il l’empêche.

7° Le Modèle de Schramm (1961)

Publié dans Le Processus et les effets de la Communication de masse (1961) par Wilbur Schramm
Publié dans Le Processus et les effets de la Communication de masse (1961) par Wilbur Schramm

Schramm ajoute un élément fondamental aux schémas classiques de communication (source – message – canal – Récepteur) , celui du champ d’expérience commun. En effet, pour que le message codé transmis par l’émetteur soit décodé et compris par le destinataire, il est fondamental qu’il y ait un champ commun (souvent un champ sémantique) entre les deux parties. Si les champs d’expérience de la source et du destinataire se chevauchent, alors il peut y avoir communication dit en substance Schramm.

8° Le Modèle de Jakobson (1963)

Publié dans Closing statements : linguistics and poetics (1963) par Roman Jakobson
Publié dans Closing statements : linguistics and poetics (1963) par Roman Jakobson

Linguiste réputé, Jabokson s’est surtout attardé à étudier le langage dans toutes ses fonctions. Le langage est toujours source de communication et Jakobson intègre les différentes fonctions du langage dans le processus de communciation. Il distingue six fonctions du langage : expressive (qui exprime les sentiments du locuteur), conative (relative à la volonté du récepteur de recevoir le message), phatique (qui sert à mettre en place et à maintenir la communication), référentielle (qui renvoie le message au monde extérieur), méta-linguistique (lorsque le code – le langage – devient l’objet du message) et poétique (lorsque la forme du message devient l’objet du message). Ces fonctions ne sont pas exclusives, au contraire elles se superposent très souvent au sein d’une communication. Le Modèle de Jakobson repose sur une vision linguistique de la communication, associé aux deux modèles précédents (Berlo et Schramm), il donne une vision assez globale de ce que peut-être la communication…

9° Le Modèle de Riley (1965)

Publié dans Communication de masse et systèmes sociaux (1965) par John et Matilda Riley
Publié dans Communication de masse et systèmes sociaux (1965) par John et Matilda Riley

Sociologues, John et Matilda Riley incluent la notion d’appartenance à des groupes sociaux au sein d’un système social global dans le processus de la communication. Les communicateurs sont donc intégrés à des groupes primaires (familles, amis, communautés…) qui prennent eux-mêmes place dans une structure plus large (catégorie sociale, professions, …) qui s’inscrit, en définitive, dans un système social global (une société). L’appartenance à ces ensembles (et sous-ensemble) influe directement sur les façons de penser, de voir et d’agir et, par corollaire sur la communication. L’appartenance à un groupe ou à une structure dirige la communication ne fut-ce que par les affinités, la hierarchie, les valeurs ou les sentiments. Vision sociologique de la communication, le Modèle de Riley est à la base des théories sur la communication de groupe qu’il s’agit de distinguer de la communication de masse.

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Avec Olivier Moch

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