En sa formulation lapidaire, le propos dâAssoa Adou sur le prétendu surendettement de la Côte dâIvoire traduit une vision pré-moderne cachée  de lâéconomie.
Lâéconomie telle que la conçoit le FPI est une économie de subsistance en cohérence avec sa vision communautariste de la société comme collectivité villageoise enracinée dans un terroir.
Le modèle sociétal du FPI est la ruralité. Son modèle économique est celui d’un socialisme communautaire prémoderne. Sa vision de lâéconomie est inspirée par le mode de production lignager qui fut dominant au sein des sociétés paysannes précoloniales traditionnelles.
Considérée comme infrastructure, cette économie de la ruralité est une économie de reproduction sociale.
Sa fonction est de restaurer les anciens rapports lignagers, dâempêcher les transformations radicales de la société impliquées par lâéconomie libre de marché. Les préventions dâAssoa Adou sur lâendettement expriment dans le fond le refus de lâéconomie industrielle de production.
La dérive ethno-nationaliste et réactionnaire du FPI, son incapacité à se définir historiquement comme parti socialiste révolutionnaire, ou à incarner une gauche centriste, son virage dans lâextrémisme identitaire de droite, en est la matérialisation.
Loin dâexprimer le souci dâune gestion rigoureuse qui préserve la souveraineté politique dâune nation face aux forces dominantes de lâéconomie libre de marché, la phobie du crédit et de lâendettement exprimée par Assoa Adou traduit un refus global de lâéconomie de libre marché, de la libre circulation du capital, de son accumulation, de lâinvestissement et du crédit.
La vision économique régressive du FPI, ses échecs sociaux et politiques subséquents expriment les impasses du socialisme africain.
En Afrique, le socialisme sâest traduit sur le terrain par la conservation de lâéconomie de subsistance, par la précarité et lâindigence des infrastructures, par la domination dâun Ãtat tutélaire, par le renforcement des inégalités, par la dualisation de la société.
Les socialistes africains se sont enfermés dès le départ dans une contradiction originaire. Ils ont réinterprété Marx et Engels en contredisant lâun des principes cardinaux de leur doctrine.
Pour Marx et Engels, le socialisme était le produit du développement de la classe ouvrière et succédait donc au capitalisme industriel.
Les socialistes africains ont tenté de fabriquer un socialisme sans classe ouvrière, sans industrie à partir des débris dâun monde tribal et féodal. Ils ont identifié le socialisme à lâentraide de type communautaire, à lâabsence de propriété individuelle du sol des sociétés lignagères.
Ils ont assimilé lâéconomie moderne de production du capital à lâéconomie traditionnelle de reproduction des hiérarchies du monde lignager.
 Ils ont identifié la démocratie pré-moderne du consensus et de la palabreà  la démocratie représentative moderne du compromis et de la confrontation des intérêts et des valeurs.
Ils ont confondu le peuple et ses classes sociales avec les ethnies et les hiérarchies lignagères, et ont assimilé le pouvoir moderne dirigé par les élus des catégories de la société globale aux pouvoirs traditionnels dirigés par les chefs lignagers (Cf: » Le progressisme africain selon le prisme déformant des gauchistes communautaires français » cedea, Décembre 2018).
Le FPI de Laurent Gbagbo incarne toutes les contradictions du socialisme africain. (A suivre)