Au 2ième tour de la présidentielle 2010, l’alliance Bédié/Ouattara avait été bâtie sur un quiproquo entre les deux chefs de parti qu’animaient des logiques et des objectifs divergents comme en attestent leurs discours et leurs praxis politiques respectives depuis l’ouverture de la guerre de succession en vue de la présidentielle 2020. 

L’un, Henri Konan Bédié, était animé par une logique autocratique et un objectif personnel de court terme : récupérer le pouvoir d’Etat en 2020 dans un but égocentré de revanche personnelle. L’autre, Alassane Ouattara, était animé par une logique démocratique et un projet politique de long terme dans une perspective globale: réaliser un programme d’intégration nationale du territoire dans la continuité de l’Houphouëtisme.

Ce quiproquo s’est donc noué autour d’une vision royaliste et patrimonialiste du pouvoir, celle d’Henri Konan Bédié et d’une vision démocratique et citoyenne du pouvoir, celle d’Alassane Ouattara.

Henri Konan Bédié, en soutenant Alassane Ouattara au 2ième tour de la présidentielle de 2010, envisageait de récupérer en 2020 un trône royal propriété d’une communauté ethnique et accidentellement perdu en Décembre 1999

Alassane Ouattara, en demandant le soutien d’Henri Konan Bédié, était à la recherche d’un front républicain pérenne pour réaliser  sur la longue durée le projet sociétal de l’houphouëtisme.

Il s’agissait dans son esprit de sceller une alliance politique républicaine afin de contenir, dans les marges et dans la minorité électorale, le nationalisme communautaire et sa vision désintégrante de la société.

En prenant le pouvoir en Décembre 2010, Alassane Ouattara envisageait de terrasser, pour longtemps en Côte d’Ivoire, l’ennemi mortel de la République et du projet sociétal houphouëtiste. Son projet était d’utiliser le pouvoir politique pour réaliser, sur le long terme, l’intégration de la cité et le renforcement de la Nation. En soutenant Alassane Ouattara par deux fois en Décembre 2010 Henri et en 2015, Konan Bédié manœuvrait pour capturer le pouvoir en 2020 afin d’assouvir une revanche personnelle fut-ce au détriment de la cohésion nationale et au prix de la désintégration de la Côte d’Ivoire.

La légèreté irresponsable, étonnante et assumée,  avec laquelle Henri Konan Bédié tente de rompre le front républicain RHDP pour réaliser son objectif de revanche personnelle de capture du pouvoir d’État en mettant en péril la stabilité politique du pays prouve que le chef d’appareil du PDCI était  en décalage avec les attentes du peuple majoritaire ivoirien.

La majorité des ivoiriens voyait dans l’alliance Bédié/Ouattara une alliance républicaine destinée à pacifier et à réconcilier durablement la Côte d’Ivoire dans les valeurs de l’Houphouëtisme. Le RHD, instrument de cette alliance programmatique, leur apparaissait comme une coalition partisane qui secondarisait les stratégies conflictuels et divergentes d’appareils

C’est le sens de l’Unification implicitement désirée et voulue du point de vue du bon sens commun par le peuple et que le comité de haut niveau des parties prenantes de la coalition devait formaliser

Le RHDP était et demeure, aux yeux du peuple majoritaire, une coalition de développement endogène destinée à réaliser l’intégration nationale du territoire.

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Du point de vue substantiel du peuple, qui est toujours le point de vue du bon sens commun, la problématique centrale était de résilier pour de bon, en Côte d’Ivoire, par cette coalition, les politiques de désintégration nationale et les formes oppressives d’État véhiculées par les extrémismes.

Dès Décembre 2010, Henri Konan Bédié et la nomenklatura ethno-nationaliste du PDCI étaient donc en porte-à-faux avec ce peuple majoritaire ivoirien.

Rien n’indique que ce peuple ait décidé de se contredire dans les urnes devant le bilan largement positif du RHDP qui poursuit obstinément le programme de modernisation intégratrice du territoire qui lui avait été fixé en Décembre 2010 par le vote majoritaire. 

Sur ce plan les mouvements sociaux de revendication des droits et les interpellations critiques citoyennes adressées au gouvernement RHDP en vue de le redresser ne doivent pas être interprétés comme étant des contestations du régime. 

La démocratie vit des mouvements sociaux, des interpellations et des contestations qui permettent de limiter le pouvoir politique par les droits de l’homme, de le soumettre aux demandes de la société et au service des intérêts sociaux du peuple.

 Il faut souligner ici un quiproquo grave : le peuple ivoirien qui revendique le respect de ses droits dans le cadre du régime démocratique en interpellant régulièrement le gouvernement à travers des mouvements sociaux,  n’est pas sur la même longueur d’onde que les acteurs  de l’extrémisme ethno-nationaliste et populiste ivoiriens. Pour ces derniers, ces mouvements de revendication démocratique des droits, expriment une révolte populaire en maturation.

Les appels Simone Gbagbo à son dieu des armées, de Moïse Lida Kouassi, d’Abdoudramane Sangaré, de Marie-Odette Lorougnon, à la révolte populaire et la guerre interethnique, les appels d’Henri Konan Bédié à la chefferie Akan contre la République, les appels d’Akossi Bendjo à la guerre de résistance contre une prétendue capture de l’État Ivoirien par des étrangers, traduisent les dérives de factions partisanes en rupture partitocratique avec la société Ivoirienne dont ils ne comprennent pas la demande d’intégration nationale.

Polarisées sur la conquête d’un pouvoir d’Etat fétichisé, négligeant les demandes sociales de la population, mobilisant des discours et des pratiques de division et d’exclusion, les forces de l’extrémisme désintégrateur sont en porte-à-faux avec le peuple Ivoirien.  En sa majorité, ce peuple attend de son personnel politique, une représentation de ses intérêts sociaux et des programmes d’intégration nationale.

Le quiproquo Henri Konan Bédié/Alassane Ouattara est la traduction spectaculaire de ce décalage.

Il exprime emblématiquement l’existence d’une profonde scission entre une fraction de la classe politique et le peuple ivoirien. (A suivre)

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