En Chine, ce qui viral c’est le témoignage d’un Français de Xi’an qui s’apprête à passer le Nouvel An confiné. Face aux problèmes d’approvisionnement dans la ville de Xi’an, le système D s’est mis en place via les applications mobiles et des groupes ont notamment été créés sur la messagerie chinoise WeChat.

Témoignage d’un Français de Xi’an qui s’apprête à passer le Nouvel An confiné

Les 13 millions d’habitants de Xi’an, dans le nord de la Chine, où plus de 1 000 cas de Covid-19 ont été enregistrés ces dernières semaines, s’apprêtent à passer le 31 décembre confiné. Pour pallier les problèmes d’approvisionnement, chacun a recours au système D.

C’est la résurgence épidémique la plus forte depuis Wuhan en Chine.

Plus de 1 000 cas de contamination locaux ont été rapportés depuis la résurgence du Covid-19 du 9 décembre dernier, avec des difficultés d’approvisionnements en vivres dans certaines résidences comme celle de Philippe de Gonzague (dont le prénom a été modifié), qui enseigne le français dans la capitale de la province du Shaanxi depuis une dizaine d’années.

RFI : « Xi’an a atteint un stade de vie ou de mort sans sa lutte contre le virus », déclarait le mercredi 29 décembre un responsable du gouvernement municipal. Les mesures de confinements ont été renforcées. Comment se traduisent-elles concrètement ?

Philippe de Gonzague : La semaine dernière, nous pouvions sortir de la résidence une fois tous les deux jours pour aller faire les courses. Mais depuis le week-end dernier, c’est terminé.

Le ravitaillement de la résidence se prépare, mais ça prend du temps. Officiellement, pour l’instant, on n’a rien reçu. Heureusement, le système D s’est mis en place via les applications mobiles et notamment des groupes sur la messagerie WeChat.

Le comité de résidence n’est pas lié à ces groupes privés de résidents qui connaissent des gens qui eux ont la possibilité de faire des livraisons. Je me retrouve ainsi dans un groupe WeChat pour recharger ma carte d’abonnement au gaz, un autre groupe pour acheter des pommes et des fraises, un autre pour acheter de l’huile, de la farine et des œufs.

À l’extérieur, les vols et les trains sont supprimés. Il y a quelques personnes qui arrivent à sortir pour aller travailler, je ne sais pas s’il reste des transports en commun.

Certaines entreprises de livraison ont fait part d’un manque de personnel…

En dehors de certains sites alimentaires bien référencés, qui sont pris d’assaut et vidés en quelques instants, il n’est pas possible de se faire livrer pour le moment. Les plateformes d’e-commerce bloquent la destination de Xi’an.

Mais cela devrait s’arranger, car nous venons de recevoir une carte donnant droit à un panier alimentaire avec des fruits et des légumes et peut-être de la viande. Pour l’instant, rien n’est encore arrivé.

Il est clair qu’il y a eu des problèmes en termes d’acheminement et de distribution des paquets alimentaires.

Preuve en est, on ne peut plus sortir depuis cinq jours et que si j’étais resté sans rien faire, mon frigidaire serait vide. Il a donc fallu passer par le système D.

Il y a beaucoup de communication à ce sujet venant des officiels : les autorités locales bombardent les applications comme Douyin (TikTok en Chine) ou WeChat, de slogans disant que le ravitaillement arrive. Mais cela dépend des résidences.

Certains quartiers, certaines tours, sont mieux approvisionnés que d’autres, on ne peut donc pas faire de généralité.

L’un de mes collègues qui habite à 800 mètres de chez moi a été livré en légumes par exemple. Les choses semblent s’arranger progressivement.

Depuis jeudi soir, ils ont mis en place une hotline sur internet. C’est une ligne directe, là encore via la messagerie chinoise WeChat, destinée à faire remonter les doléances en cas de besoins en nourriture ou besoin de médicaments.

Il y a des patients qui se plaignent d’autres pathologies et qui ne peuvent pas acheter de médicament ou se rendre à l’hôpital.

Car il y a aussi des restrictions d’accès aux médicaments en pharmacie depuis l’année dernière. Il n’est pas possible d’acheter certains antidouleurs ou aspirine sans un test PCR de moins de 48h par exemple.

Comment réagissent les habitants de Xi’an, qui se retrouvent confinés comme à Wuhan au début de la pandémie ?

Le bouclage de la ville a été assez brutal. Il a commencé il y a deux semaines maintenant. Il y a d’abord un quartier qui a été mis sous cloche en plein milieu de la nuit. Le pouvoir central a d’abord désapprouvé, puis est revenu en arrière et quatre ou cinq jours plus tard toute la ville était confinée.

Cette fulgurance a provoqué une certaine frustration, parfois de la colère avec des remarques sarcastiques notamment dans le groupe WeChat dans lequel je suis, qui correspond à ma tour d’habitation.

Cette frustration est liée probablement au fait de ne pas pouvoir sortir pour chercher des légumes et de manquer d’informations plus qu’au confinement lui-même que connaissent les Chinois.

C’est plutôt de l’agacement qu’autre chose pour l’instant. Certains se lâchent un peu, mais reviennent vite dans les rangs de peur d’être convoqués pour « boire le thé » comme on dit en Chine, autrement dit d’être interrogé par la police.

Pour ce qui est des universités, les étudiants sont confinés dans leurs dortoirs et sont également soumis à des tests de dépistages tous les jours.

Tous les cours sont en ligne depuis une semaine et demie. Certains établissements comme l’université des langues étrangères de Xi’an vont commencer le deuxième semestre, non pas fin février ou début mars comme c’était prévu après les vacances du Nouvel An lunaire, mais dans la foulée des examens de janvier, de manière à « occuper » les élèves pendant le confinement.

Quelles sont les dernières mesures sanitaires prises par les autorités. Il a été question à un moment d’une désinfection générale de la ville, le même message avait circulé à la veille du confinement de Wuhan en janvier 2020 ?

On a été informé par un message de notre communauté, et cela a également beaucoup circulé sur les réseaux officiels qu’il y aurait une désinfection de la ville. Je n’ai rien vu ni rien senti donc j’aurais tendance à dire que si cela avait été fait, ce n’était pas par voies aériennes.

La commission de la santé fait une conférence de presse tous les jours à 17h, mais en dehors des informations officielles, il est difficile d’en savoir plus.

Les réseaux sont inondés de commentaires et d’images. La communication via des vidéos diffusées a pris un essor très fort, donnant l’impression que l’image ne triche pas.

En réalité, il est difficile de vérifier et même de dire si ces images sont récentes ou non, si elles sont tournées à côté de notre résidence ou à dix kilomètres, ou même ailleurs qu’à Xi’an.

Certains peuvent vite paniquer dans ce contexte. Pour ce qui est des mesures sanitaires encore, on a surtout un dépistage massif de la population. Nous sommes testés tous les jours. Les tests PCR buccaux sont réalisés en bas des tours, comme dans toutes les résidences de Xi’an.

Comment va le moral en cette veille de réveillon ?

On prend son mal en patience et même si c’est dur de rester entre quatre murs, il faut trouver le moyen de s’occuper. Par rapport au confinement à l’hôtel, je me sens quand même beaucoup mieux chez moi. Je peux cuisiner, c’est déjà ça.

On sait de toute façon que si les choses finissent par se desserrer, on sera confiné le 1er janvier et les jours qui suivront. Donc je me suis mis de côté une boîte de foie gras et une bouteille de Beaujolais.

J’ai aussi un peu de viande et des légumes. Je vais faire des courgettes farcies aux légumes. J’ai quand même réussi à sauver mon réveillon.

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