Les bitcoins, l'astuce des Cubains pour recevoir de l'argent de l'étranger
Les bitcoins, l'astuce des Cubains pour recevoir de l'argent de l'étranger

Les bitcoins, l’astuce des Cubains pour recevoir de l’argent de l’étranger. L’argent que reçoit Gretter à Cuba de son mari aux Etats-Unis a fait un bien étrange voyage: le mandat, envoyé en bitcoins, s’est transformé en monnaie cubaine avant d’arriver à vélo, jusqu’à chez elle. Une astuce pour contourner l’embargo américain.

Précieux soutien au quotidien de nombreuses familles, les « remesas » – envois d’argent de Cubains à l’étranger vers leurs proches restés au pays -, étaient estimées en 2017 par l’économiste Carlos Mesa-Lago à 3,5 milliards de dollars par an… soit autant que le tourisme.

Mais l’embargo de Washington, en vigueur depuis 1962, se fait chaque jour plus virulent, compliquant les transferts d’argent vers Cuba. De plus en plus de banques refusent toute opération avec l’île, par crainte de sanctions, qui ont ciblé dernièrement les entreprises cubaines gérant les envois de remesas.

Et la fermeture des frontières depuis le 24 mars, en raison de la pandémie de coronavirus, empêche que ces remesas arrivent dans les bagages des voyageurs, comme c’était souvent le cas avant.

Exemple de la fameuse débrouillardise cubaine, Erich Garcia, programmateur informatique et youtuber de 33 ans, semble avoir déniché la solution miracle: le bitcoin.

« Nous avons trouvé cette alternative d’utiliser des cryptomonnaies, car alors aucune banque n’est nécessaire », explique-t-il, après avoir lancé il y a quelques semaines la plateforme bitremesas.com.

– 14 kilomètres à vélo –

« Celui qui veut envoyer de l’argent à Cuba doit acheter des bitcoins et les envoyer à travers le système automatisé de bitremesas.com, et cette somme (convertie en monnaie cubaine, ndlr) parvient au bénéficiaire à Cuba », explique Erich.

Né en 2009, le bitcoin est une monnaie virtuelle dont la diffusion et la valeur ont explosé au fil des ans: il valait un dollar en 2011, aujourd’hui plus de 11.500 dollars.

Le mari de Gretter voulait lui envoyer 100 dollars. Première étape, acheter en ligne l’équivalent, soit 0,0087 bitcoin, via un portefeuille virtuel.

A Cuba, Erich prévient la communauté d' »enthousiastes » des bitcoins de l’arrivée de cette nouvelle transaction. Comme il est difficile d’acquérir facilement cette monnaie sur l’île, ils sont prêts à payer plus cher.

Vient la deuxième étape: une enchère est organisée, via Whatsapp ou Telegram, pour déterminer qui veut céder le plus de bitcoins dans cette opération pour l’emporter (en général, environ 25% de la valeur de la transaction).

Cette fois c’est Adalberto Orta, programmateur de 33 ans, qui gagne. Avant d’obtenir ses bitcoins, charge à lui de remettre à Gretter l’équivalent de 100 dollars dans l’une des deux monnaies locales, le CUC ou le CUP.

Si elle avait un compte bancaire, il pourrait lui faire un simple transfert. Mais ce n’est pas le cas, alors il enfourche sa bicyclette et, malgré la chaleur tropicale, il parcourt 14 kilomètres pour lui remettre l’argent.

En quelques heures à peine, l’opération est passée de la technologie la plus pointue au mode de transport le plus traditionnel.

– Bitcoins, Tout le monde gagne –

« C’est mon mari qui a découvert la plateforme via Youtube et il a décidé d’essayer », raconte Gretter, 28 ans, qui reçoit justement un appel de celui-ci pour confirmer que tout a fonctionné.

D’un bout à l’autre de la chaîne, tout le monde gagne: l’émetteur et le destinataire n’ont pas de commissions à payer, celui qui remporte l’enchère obtient des bitcoins et bitremesas récupère le surplus payé par celui-ci.

Beaucoup de « Cubains reçoivent de l’argent des Etats-Unis, et c’est de plus en plus difficile, sur les sites officiels il y a le risque d’une amende très élevée » pour violation de l’embargo, explique Adalberto.

Il utilise ses bitcoins pour épargner et acheter en ligne des jeux vidéo ou des films à la demande, où il est impossible de payer avec une carte bancaire cubaine.

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Selon Erich, on estime que 10.000 Cubains utilisent déjà des bitcoins. Mais de façon discrète: l’AFP a contacté une pizzeria et un chauffeur de taxi qui acceptent cette monnaie, mais ils n’ont pas voulu témoigner.

Pour Adalberto, « cette peur, il faut la surmonter et cela se fait en apprenant des technologies ».

« Nous n’avons pas accès aux plateformes de paiement, à Visa, Mastercard, Paypal (…). Quelle technologie nous permet de rêver? Le bitcoin », renchérit Erich.

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