Il a marqué de son empreinte la vie de l’Assemblée nationale. Ancien président du Groupe parlementaire des libéraux, Doudou Wade fait partie des hommes politiques maîtrisant le plus les questions parlementaires. En prélude à l’installation de la nouvelle assemblée, la 13ème, EnQuête l’a approché pour cerner les questions brûlantes de l’heure. Mais pas que !

Les Sénégalais ont choisi le 30 juillet 2017 leurs nouveaux représentants à l’Assemblée nationale. Vu sa configuration, est-ce qu’on peut s’attendre à de grands changements ?

‘’Je demande au Président Macky Sall d’être plus honnête avec les Sénégalais’’… 

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Permettez-moi d’abord de revenir sur les conditions catastrophiques de ces élections, ou bien de cette non-élection. Dans notre pays, nous n’avons jamais vécu pareils dysfonctionnements, en dehors de la parenthèse de 1996. Il y avait à l’époque une très mauvaise organisation des élections locales. Le président Abdou Diouf avait eu l’honnêteté de reconnaître, dans une intervention radio-télévisée, qu’il n’y avait pas eu d’élections. A titre d’exemple pour les plus jeunes : à l’époque, les bulletins de vote avaient quitté la Préfecture de Dakar le samedi pour arriver le dimanche à 17 heures au centre de Niary Tally.

Cette année-ci, nous avons vu la même chose, sinon pire. Et c’est dangereux pour l’avenir de ce pays. Pendant ce temps, le chef de l’Etat se permet de faire une sortie pour féliciter son ministre de l’Intérieur d’avoir organisé de bonnes élections. Or, ce qui s’est passé durant ces élections est plus catastrophique que ce qui s’est passé au baccalauréat.

Mais en quoi cela constitue-t-il un danger pour le Sénégal ?

Empêcher des Sénégalais d’exprimer leur choix. Faire en sorte que les bulletins de vos adversaires ne soient pas disponibles dans les endroits qui leur sont favorables. Faire en sorte que 97% des électeurs de Fatick récupèrent leurs cartes d’électeurs. Faire qu’ils puissent démarrer le scrutin juste à 8 heures. Au même moment, à Touba, non seulement les taux de retrait sont faibles, mais aussi on commence à voter à 18 heures. C’est inadmissible. Ce que nous avons vu cette année, si Macky Sall demande à son ministre de faire la même chose, cela risque de nous mener vers des dérives. Je dois dire que même moi, je voulais voter mais je n’ai pu le faire pour la première fois depuis longtemps. Ma carte était sortie, mais je ne figurais pas sur les listes de mon bureau. Le président de la République et son ministre m’ont empêché de voter.

Pour dénoncer tout ça, vous avez sorti un livre blanc que le ministre de l’Intérieur qualifie de tissu de contrevérités. Quel commentaire en faites-vous ?

Ce que je retiens, c’est que le directeur général des élections comme le ministre lui-même reconnaissent qu’il y a eu des manquements. Et ça, tout le monde l’a constaté. Il y a eu des manquements graves sur l’organisation, la mise à disposition du matériel, des manquements à tous les niveaux. Quand il y a des manquements à des obligations prescrites par la loi, il faut avoir le courage de reconnaître qu’on a tort. Le ministre a commis des fautes lourdes. Mieux, il a fraudé pour gagner ces élections. Quand on a fauté, on doit être puni.

Vous parlez du ministre Abdoulaye Daouda Diallo. Certains demandent son départ du ministère de l’Intérieur. Etes-vous d’avis ?

Je pense qu’aujourd’hui, il n’est plus question pour l’opposition d’accepter de participer à des élections organisées par un ministre partisan. C’est même une question d’honnêteté intellectuelle. Je demande au Président Macky Sall d’être plus honnête avec les Sénégalais. En 2012, c’est lui-même qui demandait qu’Ousmane Ngom n’organise plus les élections. Car il est membre d’un parti politique. Je pense qu’il ne devait même pas attendre qu’on le lui demande. ‘’Bu doon garmi, du xaar ñu wax ko loolu’’ (S’il était un noble, il n’allait pas attendre qu’on lui fasse cette remarque). Les futures élections doivent être organisées par une personne neutre.

Vous rejetez tout sur le ministre de l’Intérieur. Mais est-ce que vous aussi, vous n’avez pas une part de responsabilité dans cette situation que vous qualifiez de non-élection ?

Nous n’avons aucune part de responsabilité dans ce qui est arrivé. C’est le ministre de l’Intérieur qui organise les élections. Il est l’unique responsable de ce qui s’est passé : les fraudes, le vol organisé ; tout lui est imputable.

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