Comment le Sri Lanka est-il arrivé à une mauvaise gestion du pays et à de nombreuses manifestations ? Décryptage

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Le Sri Lanka est englouti par de nombreuses manifestations. Depuis plusieurs semaines, des manifestations se tenaient à travers tout le pays. Le gouvernement et sa mauvaise gestion du pays est visé. Comment le Sri Lanka en est-il arrivé là ? Vers quel futur se dirigent les Sri-lankais ? Décryptage.

Revenons plusieurs décennies en arrière…

Revenons plusieurs décennies en arrière...
Revenons plusieurs décennies en arrière…

Pour mieux comprendre la situation actuelle au Sri Lanka, il faut d’abord revenir plusieurs années en arrière.

Entre juillet 1983 et mai 2009, le Sri Lanka a connu une guerre civile, opposant une majorité cingalaise bouddhiste conduite par l’armée sri-lankaise, à une minorité tamoule, installée au nord et à l’est de l’île.

Sri Lanka victime d’une fracture ethnique dans le pays depuis 1948

Une fracture ethnique dans le pays depuis 1948
Une fracture ethnique dans le pays depuis 1948

Les racines de ce conflit remontent à la fin de la colonisation Britannique. À l’indépendance de l’île, en 1948, c’est la majorité cingalaise et bouddhiste qui prend le pouvoir, au détriment des tamouls, des hindoues et des chrétiens, qui sont accusés d’avoir été proches des colons, et de fait, sont marginalisés.

Les tensions s’intensifient

Les tensions s'intensifient
Les tensions s’intensifient

Des lois discriminatoires contre les Tamouls font leur apparition dans les années 1970. Un étudiant tamoul devait par exemple récolter plus de points qu’un étudiant cinghalais, pour une même place à l’université.

En 1972, le bouddhisme devient la religion d’État. C’en est trop pour les jeunes tamouls, qui après avoir manifesté pacifiquement pour leurs droits pendant des années, finissent par créer un mouvement armé, les Tigres de libération de l’Eelam Tamouls (LTTE), réclamant la création d’un État indépendant.

La radicalisation des Tigres Tamouls

La radicalisation des Tigres Tamouls
La radicalisation des Tigres Tamouls

Au fil des années, les tensions entre l’État et les tamouls grimpent encore. En 1977, des affrontements éclatent entre la police sri-lankaise et de jeunes tamouls.

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S’ensuivent des émeutes à travers le pays contre la minorité ethnique, qui feront des centaines de morts chez les tamouls. Peu à peu, les Tigres Tamouls se radicalisent ; c’est le début de la guerre civile.

Près de 100 000 morts

Près de 100 000 morts
Près de 100 000 morts

La guerre civile au Sri Lanka va durer pendant 26 ans, entrecoupée par des périodes de trêves.

Elle se terminera avec la mort de Velupillai Prabhakaran (photo), chef du mouvement des Tigres Tamouls, le 19 mai 2009.

Elle fera environ 100 000 morts, dont 40 000 civils dans les dernières semaines du conflit selon les chiffres de l’ONU, des centaines de milliers de déplacés et des milliers de disparus.

L’après-guerre

L'après-guerre
L’après-guerre

Le président de l’époque, Mahinda Rajapaksa, nie toute atrocité attribuée à l’armée sri-lankaise, alors dirigée par son frère Gotabaya Rajapaksa, à l’encontre de la population tamoule.

Il refuse que des enquêtes internationales soient effectuées pour éclaircir la situation sur la responsabilité de l’État. Les hostilités entre la minorité tamoule et le gouvernement n’ont jamais disparu.

La dynastie des Rajapaksa

La dynastie des Rajapaksa
La dynastie des Rajapaksa

Avant d’aller plus loin pour comprendre la situation actuelle du Sri Lanka, intéressons-nous à la famille Rajapaksa, dont les membres dirigent le pays depuis près de 20 ans.

Gotabaya Rajapaksa

Gotabaya Rajapaksa, président actuel du Sri Lanka, deepuis 2019
Gotabaya Rajapaksa, président actuel du Sri Lanka, deepuis 2019

Depuis 2019, Gotabaya Rajapaksa est le président actuel du Sri Lanka. Après une carrière militaire dans les années 1970 et 1980, il devient secrétaire d’État au ministre de la Défense entre 2005 et 2015. Il était sur la sellette depuis plusieurs mois pour sa mauvaise gestion du pays.

Mahinda Rajapaksa

Mahinda Rajapaksa
Mahinda Rajapaksa

Son frère, Mahinda Rajapaksa, a été à la tête du gouvernement en 2004, avant de devenir Président de la République entre 2005 et 2015.

En 2019, à la suite de l’élection de son frère, il retrouve son poste de Premier Ministre. Au vu des émeutes récentes dans le pays, il démissionne de son poste le 9 mai 2022.

Les autres membres Rajapaksa dans le gouvernement

Les autres membres Rajapaksa dans le gouvernement
Les autres membres Rajapaksa dans le gouvernement

Mais ce ne sont pas les deux seuls membres qui dirigent le pays ces dernières années. Le président a également nommé son frère ainé, Chamal Rajapaksa, au poste de ministre de l’Irrigation, de la Sécurité, de l’Intérieur et de la Gestion des catastrophes.

Le fils du président, Shasheendra Rajapaksa est devenu secrétaire d’État à l’agriculture, et son neveu, a hérité du ministère de la Jeunesse et des Sports.

Une économie tournée vers le tourisme

Une économie tournée vers le tourisme
Une économie tournée vers le tourisme

Revenons à la situation du Sri Lanka à sa sortir de guerre, qui explique sa crise économique actuelle.

Au début des années 2010, le président Mahinda Rajapaksa (vous avez suivi ?) veut rebooster la croissance du pays, et mise tout sur le tourisme.

Il priorise de grands projets d’infrastructures, et contracte alors des dettes astronomiques.

Endettés auprès de la Chine

Endettés auprès de la Chine
Endettés auprès de la Chine

La Chine va jouer le rôle de banquier du Sri Lanka, afin que le pays puisse développer ses projets faramineux.

Le Sri Lanka emprunte à la Chine 200 millions de dollars pour la construction de son aéroport international, 1,4 milliard de dollars pour la construction du port en eaux profondes de Hambantota, ou encore 15,5 millions de dollars pour un centre de conférence.

La « Lotus Tower » (photo), un gratte-ciel dominant la capitale, mais jamais ouvert au public, a aussi été financé par des fonds chinois.

Des événements viennent perturber le pays

Des événements viennent perturber le pays
Des événements viennent perturber le pays

La croissance du Sri Lanka était finalement sur la bonne voie, notamment grâce au tourisme.

Mais en 2019, un attentat terroriste va viser plusieurs lieux touristiques du pays, ce qui va considérablement affecter le secteur. Ajoutez à cela, une pandémie mondiale en 2020, et c’est toute l’économie qui s’effondre.

Une réforme agricole qui dérange

Une réforme agricole qui dérange
Une réforme agricole qui dérange

En 2021, le gouvernement avait pour projet de devenir le premier producteur mondial d’aliment 100% biologique.

Les pesticides et autres produits agrochimiques ont alors été interdits du jour au lendemain dans le pays, provoquant la colère des agriculteurs, pourtant principal soutien du Président.

Mais face à la crise économique qui prenait de l’ampleur dans le pays, les prix qui augmentaient considérablement et les pénuries de vivres qui se multipliaient, ces restrictions ont finalement été levées.

L’impact de la guerre en Ukraine

L'impact de la guerre en Ukraine
L’impact de la guerre en Ukraine

La guerre en Ukraine n’a pas non plus arrangé les affaires du Sri Lanka. L’Ukraine, comme la Russie, était le premier client de thé noir exporté par le Sri Lanka.

Demande d’aide au FMI

Demande d'aide au FMI
Demande d’aide au FMI

Avec une dette extérieure estimée à 51 milliards de dollars (dont 10% détenus par la Chine), le Sri Lanka, au bord de la faillite, a dû demander de l’aide au Fonds Monétaire International (FMI) en mars 2022.

Dans une allocution, le chef d’État a annoncé : « Après mes discussions avec le Fonds monétaire international, j’ai décidé de travailler avec eux ».

« La responsabilité qui repose sur vous »

L'après-guerre
L’après-guerre

Lors de cette allocution, il a appelé ses compatriotes à limiter « l’usage du fioul et de l’électricité autant que possible », avant d’ajouter : « J’espère que vous comprenez la responsabilité qui repose sur vous en cette période difficile. »

Un pays accablé par les pénuries

Un pays accablé par les pénuries
Un pays accablé par les pénuries

Aujourd’hui, le Sri Lanka souffre de lourdes pénuries, engendrées par la crise économiques qui a fait flamber les prix (30% d’inflation rien qu’au mois d’avril).

Il n’y a désormais plus une goutte d’essence dans les stations-services, mais d’autres pénuries s’ajoutent à celle du carburant.

Des coupures d’électricité durent parfois jusqu’à 13 heures par jour dans le pays, et par manque de médicaments, les hôpitaux publics doivent stopper toutes les opérations. Une situation critique qui paralyse le pays.

L’état d’urgence décrété dans tout le pays

L'état d'urgence décrété dans tout le pays
L’état d’urgence décrété dans tout le pays

Dans les rues de tout le pays, les manifestants demandaient la démission du Président de la République.

Face à l’ampleur que prenait le mouvement, et les violences qui se multipliaient, le chef d’État avait déjà décrété l’état d’urgence en mai dernier, en imposant un couvre-feu à ses 22 millions d’habitants.

Comment s’en sortir ?

Comment s'en sortir
Comment s’en sortir

Alors que le Premier Ministre a déjà démissionné, son frère Président en fera-t-il vraiment de même cette semaine ?

Pour autant, la situation économique ne risque pas de s’améliorer du jour au lendemain. Il faudra une aide du FMI et une refonte totale de l’économie du pays pour imaginer un futur plus prospère.

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