L’entre-soi des prix littéraires français épinglé. ENQUETE – Le « New York Times » révèle l’entre-soi, les nombreux conflits d’intérêts et l’absence de remise en question des prix littéraires, après l’affaire Gabriel Matzneff.
Le quotidien américain New York Times a publié dans ses colonnes une enquête édifiante, qui révèle l’entre-soi, les nombreux conflits d’intérêts et l’absence de remise en question d’un milieu fonctionnant en vase clos, celui des prix littéraires.
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New york times fait de graves révélations sur des Violences sexuelles
« Les répercussions de l’affaire Matzneff ont essaimé dans toute la France, divisant les féministes et signant la fin de carrière apparente d’un puissant adjoint au maire de Paris. Pourtant, le petit monde qui domine la vie littéraire française demeure largement indemne, démontrant à quel point il est enraciné et inflexible », écrit le quotidien.
Pas de transformations des prix littéraires
Le journal poursuit ainsi le travail commencé autour de l’écrivain Gabriel Matzneff, visé par une enquête pour viols sur mineur de moins de quinze ans.
Dans la foulée du scandale autour de l’écrivain, l’ex-adjoint à la culture de la Mairie de Paris, Christophe Girard, a été poussé à la démission en raison des liens qu’il entretenait avec l’écrivain.
Le New York Times a publié une longue interview de Gabriel Matzneff mais aussi le témoignage d’un homme de 46 ans d’origine tunisienne, qui accuse Christophe Girard de l’avoir agressé sexuellement quand il avait 16 ans.
Ces révélations auraient pu susciter des transformations dans le milieu des prix littéraires, et notamment au Renaudot, qui avait remis en 2013 un prix à l’écrivain accusé de pédocriminalité, alors même que ces faits étaient rapportés dans ses livres, sus et connus de tous les jurés.
Il n’en est rien, rapporte le New York Times : « Le jury qui choisira lundi le lauréat du Prix Renaudot de cette année est, à une personne près, celui-là même qui louait Gabriel Matzneff en 2013. »
Les jurés militent pour des amis, des livres qu’ils éditent
Le quotidien souligne qu’en France, les jurés des prix littéraires sont nommés à vie, et que les conflits d’intérêts ne sont jamais pointés du doigt ni interdits par le fonctionnement de ces prix.
La comparaison avec les prix littéraires anglo-saxons est tranchante : « Jamais de telles situations ne seraient tolérées pour des prix tels que le Booker Prize en Grande-Bretagne ou le Pulitzer en Amérique, dont la composition des jurys est renouvelée chaque année et où les jurés se récusent en cas de potentiel conflit d’intérêts. »
Les jurés militent pour des livres qu’ils éditent ou des amis qu’ils soutiennent, démontre le New York Times. Christian Giudicelli, membre du Renaudot, est un ami de Gabriel Matzneff.
Patrick Besson, également membre du Renaudot, a plaidé en faveur d’une autrice, Anne-Sophie Stefanini, qui était sa compagne, rapporte le journal.
Une seule femme parmi les dix jurés
« De 2010 à 2019, en moyenne, près de trois des 10 jurés du Renaudot étaient liés à l’éditeur du lauréat de l’année dans la catégorie « romans » – soit trois fois la moyenne des autres grands jurys [Goncourt, le Femina et le Médicis]. Sur trois années données, la moitié des jurés étaient publiés chez le même éditeur que celui du lauréat », ajoute le New York Times.
Résultat, souligne le quotidien, les prix littéraires sont minés par l’entre-soi, favorisé par la cooptation. Cette année, le jury du Renaudot ne comportait qu’une seule femme parmi les dix jurés.
« Pour les quatre grands prix cités, soit 38 jurés au total, on compte une seule personne non-blanche. Le jury du Goncourt ne comporte que trois femmes. »
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