Vous avez quand même boycotté le processus électoral.

Exclusif ! Entretien avec Doudou Wade, ancien président du groupe parlementaire libéral : ‘’Je demande au Président Macky Sall d’être plus honnête avec les Sénégalais’’ 1

Nous n’avons pas boycotté le processus. C’est le président qui a renié à ses engagements. En 2010-2011, quand le problème s’est posé, le Président Abdoulaye Wade avait accepté l’audit du fichier, la mise en place d’un comité de veille, le tout sous la supervision de la coopération internationale, particulièrement l’Union européenne, la France et l’Allemagne. Macky Sall n’a pas eu la même hauteur. Maintenant, je pense que l’opposition, les citoyens, doivent se rendre comte qu’avec Macky Sall, on ne peut obtenir des avancées qu’avec la bagarre. Il faut se soulever, se battre pour jouir de ses droits. Et je pense qu’avoir la liberté de choisir ses représentants vaut tous les sacrifices du monde.

Vous aviez la liberté d’aller à ces élections dans le cadre d’une grande coalition de l’opposition. Vous l’avez essayé avec MTS, mais ça n’a pas marché. Ne regrettez-vous pas cette dislocation de MTS ?

Chez nous, il n’y a pas de regret. Nous ne le regrettons pas, parce que nous avons été avisés. Et nous avons essayé d’aviser les autres. Le 12 janvier 2017, le président Wade nous avait adressé une lettre pour nous dire, en un mot : ‘’Pour battre, Macky Sall fera tout. Il va s’asseoir sur la loi électorale, confisquer la voix du peuple pour arriver à ses fins en 2019.’’ Il ajoutait que ‘’le Pds seul peut secouer le baobab, mais pour le terrasser il faut aller vers une coalition gagnante’’. Il disait aussi qu’il avait instruit Omar Sarr de prendre langue avec les autres partis de l’opposition. Nous avons donc tout fait pour rassembler l’opposition et aller à ces élections dans une même coalition. Nous avions réussi à avoir un bon départ. Malheureusement, le projet a avorté à cause de l’inexpérience de certains, la boulimie des autres. Cela a donné les résultats que vous savez.

Est-ce les gens de MTS qui étaient boulimiques ou les libéraux qui n’avaient pas été conciliants ?

Le PDS sur cette question était beaucoup plus prêt à faire des sacrifices. Il ne faut pas oublier que c’est Babacar Gaye qui a le premier proposé Khalifa Sall comme tête de liste à Dakar. Il a aussi demandé à ce que son parti soit dominant dans la liste départementale. Nous étions prêts et nous l’avions exprimé, pour laisser les cinq députés de Dakar aux partisans de Khalifa Sall. Car nous étions convaincus que cette coalition demandait des sacrifices non seulement au parti, mais il fallait que certains militants soient prêts à se sacrifier autour de cet objectif. Mais en politique, il y en a qui sont trompés par le mirage télévisuel et le mirage des radios. Je pense qu’aujourd’hui, si nous devions être tentés d’aller à une élection, chacun sait à quoi s’en tenir, et les raisons de se sacrifier. Le plus important, ce n’est pas d’exprimer des regrets. L’essentiel pour un homme politique est de pouvoir tirer les enseignements qu’il faut, suite à de pareilles expériences.

De ces expériences, il ressort que votre Coalition arrive en deuxième position. Certains responsables comme El Hadj Amadou Sall réclament le statut du chef de l’opposition. Etes-vous dans la même logique ?

Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de revendiquer le statut de chef de l’opposition. Ce statut est prévu par la charte fondamentale de notre pays. Dans les dispositions du Règlement intérieur, il est clairement dit que l’opposition parlementaire désigne les députés qui s’opposent à la politique du gouvernement. Qui est le chef de l’opposition ? Il n’est pas besoin d’être un sorcier pour le savoir. Le chef de l’opposition doit venir du groupe le plus représentatif de cette opposition. Au sortir de ces élections, tout le monde sait que c’est le PDS qui l’incarne. Par conséquent, il n’y a pas de revendication à faire. Là aussi, c’est un problème d’honnêteté intellectuelle qui se pose. C’est le président de la République lui-même qui a émis le projet de renforcer l’opposition à travers son chef, bien que le statut du chef de l’opposition figurât dans la Constitution de 2001. Le projet a été approuvé par le peuple sénégalais lors du référendum de 2016. Qu’est-ce qu’il a fait depuis lors pour respecter son engagement ? Il faut aller demander au Président Macky Sall ce qu’il en est du statut du chef de l’opposition, de la modernisation des partis politiques, entre autres. Moi, je me limite à constater que le chef de l’Etat n’est pas prêt à respecter ces lois approuvées par le peuple.

Ce peuple a choisi ses nouveaux représentants à l’Assemblée nationale. Vu la configuration de cette institution, peut-on s’attendre à de grands changements ?

Le changement ne dépend pas seulement des députés. Même si les députés en veulent, avec un président comme Moustapha Niasse, il ne faut pas s’attendre à des merveilles. Le rôle du président de l’Assemblée dans l’évolution de cette institution est extrêmement important. J’ai entendu Moustapha Diakhaté, au cours d’une émission sur le bilan de la dernière législature, dire que le premier dossier sur lequel il a voulu travailler, c’était le règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Il s’est avéré que des députés ont pris des initiatives pour faire des propositions de lois. Mais le président s’est assis sur tous les dossiers. Il a été un blocage certain sur les initiatives des députés. En quittant en 2012, nous avions laissé sur place un projet de réforme du règlement intérieur. Lequel projet est resté lettre morte à cause du président Moustapha Niasse. Si on continue avec le même président, avec les mêmes habitudes, la 13ème législature risque d’être pire que la 12ème.

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