– La langue de l’État

Le portugais est officiellement la langue du Parlement, du moins dans la promulgation et la publication des lois. Dans les faits, le portugais et le créole capverdien sont admis dans les débats oraux, mais la plupart des députés n’utilisent que le créole dans les délibérations et les travaux des comités. Les lois sont rédigées en portugais seulement. 

Il en est ainsi dans les tribunaux où les témoignages peuvent être en créole, mais non les documents écrits obligatoirement présentés en portugais ou dans une langue étrangère accompagnée d’une traduction dans la langue officielle. L’emploi du créole n’est pas un droit, mais une pratique tolérée, car aucun citoyen ne se voit interdire de faire ses déclarations ou ses témoignages en créole.

L’administration publique pratique la même politique à l’égard des demandes orales en créole et des demandes écrites en portugais. Cela signifie que les fonctionnaires répondent toujours en créole aux demandes faites oralement dans cette langue. Non seulement les ministres s’adressent en créole à la population, mais également le président de la République et le premier ministre. Cependant, les documents administratifs ne sont pas disponibles en créole; il faut donc connaître le portugais.  

Dans les écoles, la langue d’enseignement demeure le portugais, à tous les niveaux, c’est-à-dire du primaire à l’université en passant par le secondaire. Dans les écoles primaires, la langue d’enseignement est le portugais, mais des cours sont prévus pour l’évaluation de la culture créole, le «repositionnement» (reposicionamento) de la langue portugaise en tant qu’apport culturel dans la société capverdienne.

L’organisation des études portent sur quatre domaines: la langue portugaise, les mathématiques, les «sciences intégrées» (histoire, géographie et sciences de la nature) et l’expression orale. La Loi fondamentale sur le système d’éducation (1990) définit les principes fondamentaux de l’organisation et du fonctionnement du système d’éducation, y compris l’enseignement public et privé. L’article 9 de la loi énonce que l’éducation doit être fondée sur les valeurs, les besoins et les aspirations individuelles et collectives, et se connecter à la communauté,associant au processus éducatif les aspects les plus pertinents de la vie et de la culture capverdiennes. Parmi les nombreux objectifs de l’enseignement fondamental (primaire), figure à l’alinéa i) celui de promouvoir la connaissance, l’empressement (« apresso ») et le respect pour les valeurs qui incarnent l’identité culturelle du Cap-Vert (art. 19):

Article 19

Objectifs

Les objectifs de l’enseignement fondamental sont les suivants:

i) Promouvoir l’utilisation appropriée de la langue portugaise comme instrument de communication et d’étude;j) Promouvoir la connaissance, l’empressement et le respect pour les valeurs qui incarnent l’identité culturelle du Cap-Vert.

L’enseignement primaire obligatoire dure six ans et le portugais reste la langue d’enseignement, mais les enseignants peuvent utiliser le créole capverdien pour quelques illustrations, surtout quand le problème de compréhension en portugais se pose. L’enseignement secondaire est, également, de six années, et il comporte trois cycles:

1er cycle: 7e et 8e années

portugais : 4 h par semaine
anglais : 4 h par semaine 
français : 4 h par semaine
2e cycle: 9e et 10e années

portugais : 4 h par semaine
anglais : 3 h par semaine
français : 3 h par semaine
3e cycle : 11e et 12e années

portugais : 3 h par semaine
anglais : 4 h par semaine
français : 4 h par semaine

L’enseignement secondaire assure la continuité du primaire en recourant encore à la langue portugaise comme véhicule d’enseignement. Selon l’article 22 de la Loi fondamentale sur le système d’éducation, l’un des objectifs de l’enseignement secondaire est de promouvoir la maîtrise de la langue portugaise en renforçant la capacité d’expression orale et écrite:

Article 22ObjectifsLes objectifs de l’enseignement secondaires sont les suivants:Les objectifs de l’enseignement secondaires sont les suivants:c) Promouvoir la maîtrise de la langue portugaise en renforçant la capacité d’expression orale et écrite;g) Promouvoir l’enseignement des langues étrangères.

La langue de l’enseignement supérieur est le portugais. Pour la formation en anglais et en français, les langues sont respectivement l’anglais et le français, avec quelques recours parfois au portugais. Pour la formation en créole ( assez instable), on utilise le créole capverdien, et ce, uniquement à l’Institut supérieur de l’éducation (ISE).

Tous les médias écrits n’emploient que le portugais, mais les médias électroniques, particulièrement la radio (Radio Nacional De Cabo Verde et Radio Nova), ont recours davantage au créole capverdien, mais la télévision d’État, la Televisão Nacional De Cabo Verde, diffuse surtout en portugais. Les journaux les plus importants sont le Novo Jornal De Cabo Verde(hebdomadaire) l’A Semana (hebdomadaire) et le Horizonte (État).

Dans le domaine des affaires et du commerce, l’article 52 du décret-loi no 15 du 14 février (2005) oblige les sociétés de gestion des fonds d’investissement à fournir leurs documents en portugais:

Article 52Commercialisation au Cap-Vert

4) 
Les sociétés de gestion des fonds d’investissement doivent fournir les documents en portugais ainsi que les informations devant être publiés dans le pays de leur lieu de résidence et procéder à leurdivulgation en vertu des termes applicables aux fonds d’investissement nationaux.

Mais la loi la plus importante de ce genre est le décret-loi no 3 du 29 mars (1999) qui prescrit à l’article 85 l’usage du portugais pour les entreprises enregistrées. Le premier paragraphe énonce que «les entreprises doivent être correctement enregistrées en langue capverdienne ou portugaise», mais toutes les autres dispositions ne concernent ensuite que la langue portugaise. Tout ce qui n’existe pas en portugais, voire en latin ou en grec, est considéré comme «étranger». Voici les exceptions admises dans les entreprises:

Article 85Utilisation du portugais3) Des dispositions du paragraphe 1 est exclu l’usage de mots ou de parties de mots, même s’ils sont étrangers ou faits de façon étrangère:a) s’ils correspondent à un vocabulaire d’usage généralisé, sans traduction adéquate en portugais ;b) s’ils entrent dans la composition des entreprises déjà enregistrées ou correspondent en totalité ou en partie à des noms ou à des firmes associées, des mécènes ou des fondateurs ou, dans le cas de filiales, succursales ou autres formes de représentation, à des entreprises de sociétés-mères étrangères, qui sont légalement enregistrées dans leur pays d’origine et sont officiellement autorisées à les utiliser ;c) s’ils constituent une marque commerciale ou industrielle d’usage légale, conformément à la législation;d) s’ils résultent de la fusion des mots ou de parties de mots portugais ou étrangers, admissibles en vertu du présent paragraphe, qui sont directement liées aux activités réalisées ou à l’exercice ou même retirés des éléments restants dune firme ou des noms des entreprises associées, mécènes ou fondateurs;e) s’ils visent à faciliter une plus grande pénétration du marché à l’étranger où sont dirigées les activités à mener ou à exercer; f) s’ils résultent de l’emploi correct de termes dans les langues classiques du latin ou du grec.

Il semble clair que les mots en créole font partie des langues étrangères. 

– La langue des relations internationales

Dans les relations internationales, l’article 11 de la Constitution énonce que l’État du Cap-Vert doit maintenir «des liens spéciaux d’amitié et de coopération avec les pays de langue officielle portugaise et avec les pays d’accueil des émigrants capverdiens»: 

Article 11Relations internationales6)  L’État du Cap-Vert maintient des liens spéciaux d’amitié et de coopération avec les pays de langue officielle portugaise et avec les pays d’accueil des émigrants capverdiens. 

Le Cap-Vert fait officiellement partie des pays lusophones. Depuis 1990, de nombreux accords de coopération scientifique et technique ont été signés entre les États de la CPLP, ce qui a donné lieu à plusieurs commissions communes de terminologie. Dans les organisations internationales qui ne concernent pas les pays lusophones, les fonctionnaires utilisent surtout le français, rarement l’anglais. La langue véhiculaire des diplomates étrangers accrédités au Cap-Vert est le français  (la  majorité) et le portugais, dans certains cas.

– L’accord orthographique de 1990

Le traité le plus important concerne l’Accord orthographique sur la langue portugaise de 1990 — Acordo Ortográfico da língua Portuguesa — qui a pris en compte les différences linguistiques afin de réduire les difficultés liées à la tendance naturelle à la différenciation et de préserver les intérêts de la langue portugaise dans les pays lusophones.

À la suite des délibérations entre les délégations de l’Angola, du Cap-Vert, de la Guinée-Bissau, du Mozambique et de São Tomé et Príncipe, ainsi que des observateurs de la Galice (Espagne), les États signataires — la République populaire d’Angola, la République fédérative du Brésil, la république du Cap-Vert, la république de la Guinée-Bissau, la république de Mozambique, la république du Portugal et la République démocratique de São Tomé et Príncipe — ont convenu des dispositions qui suivent (l’accord comptant quatre articles).

L’article 1er ne fait que proclamer l’adoption de l’accord orthographique de 1990, mais l’article 2 énonce que les États signataires prendront les mesures nécessaires en vue d’élaborer un vocabulaire orthographique commun de la langue portugaise en ce qui concerne les terminologies scientifiques et techniques.

Article 2Les États signataires doivent prendre, par l’entremise des institutions et organismes compétents, les mesures nécessaires en vue de l’élaboration, jusqu’au 1er janvier 1993, d’un vocabulaire orthographique commun de la langue portugaise, aussi complet que souhaitable et normalisé que possible en ce qui concerne les terminologies scientifiques et techniques.

Selon l’article 3, l’Accord devait entrer en vigueur le 1er janvier 1994, une fois que seront déposés les instruments de ratification de tous les États signataires auprès du gouvernement de la république du Portugal. Pour diverses raisons, la date butoir a été reportée en mai 2015, car en janvier 1994 seuls le Portugal, le Brésil et le Cap-Vert avaient ratifié l’accord. Quant àl’article 4, il oblige les États signataires à prendre les mesures appropriées pour assurer le respect effectif de la date d’entrée en vigueur établie à l’article précédent. Le document fut signé par les sept États, à Lisbonne, le 16 décembre 1990.

Le traité est accompagné d’annexes décrivant les points orthographiques et/ou grammaticaux sur lesquels porte l’accord: alphabet, h initial et final, homophonie, séquences consonantique, voyelles atones, voyelles nasales, accentuation des oxytons/paroxytons, accent grave, tréma, trait d’union, apostrophe, minuscules et majuscules, divisions syllabiques, etc.

–  La Communauté des pays de langue portugaise

En 1996, le Portugal ainsi que sept de ses anciennes colonies ont fondé la Comunidade dos Países de Língua Portuguesa (CPLP), la Communauté des pays de langue portugaise. Les pays membres étaient les suivants: l’Angola, le Brésil, le Cap-Vert, la Guinée-Bissau, le Mozambique, le Portugal et Sao Tomé-et-Principe. Après son indépendance, le Timor oriental a rejoint l’organisation comme 8e pays membre. La CPLP veut promouvoir la langue portugaise ainsi que la culture commune qui unit les pays membres. Plus particulièrement, les pays lusophones désirent collaborer dans le domaine de l’éducation, mais chercheront aussi à renforcer les liens culturels, politiques et économiques. La CPLP a son siège social à Lisbonne.

Grosso modo, les pays de la CPLP veulent encourager la diffusion et l’enrichissement de la langue portugaise, accroître les échanges culturels dans l’espace lusophone, renforcer la coopération entre les pays de langue portugaise dans le domaine de la concertation politique et diplomatique, encourager le développement d’actions de coopération interparlementaire, développer la coopération économique, dynamiser et approfondir la coopération dans le domaine universitaire, de la formation professionnelle et dans les différents secteurs de la recherche scientifique et technologique, mobiliser des efforts et des ressources en appui solidaire aux programmes de reconstruction et de réhabilitation, promouvoir la coordination des activités des institutions publiques et entités privées, associations de nature économique et organisations non gouvernementales œuvrant au développement de la coopération entre les pays lusophones, etc. 

Quoi qu’il en soit, certains critères se trouvent à la base du concept de lusophonie:

1) un pays qui adopte la langue portugaise comme langue véhiculaire est un pays lusophone;

2) une communauté qui regroupe les sept peuples qui parlent portugais, ainsi que Timor, Goa et Macao est une communauté lusophone;

3) un pays où le portugais est une langue écrite et où cette pratique se généralise à tout le territoire est un pays où la lusophonie est en progression (c’est le cas du Timor oriental); par conséquent, le concept fondateur de la CPLP ne rattache pas nécessairement les locuteurs du portugais au monde de la lusophonie. Ainsi, un ensemble de pays dont la langue officielle, maternelle ou d’emprunt est le portugais est une communauté de pays de langue portugaise. 

– La Déclaration constitutive des pays de langue portugaise  

Deux documents ont été signés, le 17 juillet 1996, par les États de la CPLP: la Déclaration constitutive des pays de langue portugaise (Cimeira Constitutiva da Comunidade dos Países de Língua Portuguesa) et les Statuts de la Communauté des pays de langue portugaise (Estatutos da Comunidade dos Países de Língua Portuguesa).

La Déclaration constitutive des pays de langue portugaise a institutionnalisé la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP). L’article 3 de la Charte de la Communauté des pays de langue portugaise exprime clairement les objectifs de ces sept pays:

1) concertation politique et diplomatique entre ses membres en matière de relations internationales, principalement dans le but d’affirmer sa présence (de la CPLP) dans les congrès internationaux ;
2) la coopération, particulièrement dans les domaines économique, social, culturel, juridique, technique et scientifique;
3) la mise en œuvre de projets destinés à promouvoir et à diffuser la langue portugaise.

– Les statuts des pays de langue portugaise (CPLP)

La Déclaration constitutive est accompagnée des Statuts de la Communauté des pays de langue portugaise, qui comptent 22 articles.  Seul l’article 3 traite de la langue portugaise, les autres articles concernent le fonctionnement de la CPLP. Voici les objectifs tels qu’énoncés par l’article 3:

a) la concertation politique et diplomatique entre ses membres en matière de relations internationales, nommément en vue de renforcer leur présence aux fora internationaux;
b) la coopération, nommément dans les domaines économique, social, culturel, juridique, technique et scientifique;
c) la matérialisation de projets visant à la promotion et à la diffusion de la langue portugaise.

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