Messi enfin héritier de Maradona

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Messi enfin héritier de Maradona. L’Argentine et Messi au firmament du football après une finale de légende de la Coupe du Monde FIFA 2022. C’est une confirmation de Messi enfin héritier de Maradona. Diego Maradona et Lionel Messi ont eu une relation mouvementée rythmée par les critiques virulentes de l’ancien sélectionneur argentin contre celui que l’on a très tôt présenté comme son héritier. Pendant un certain temps, l’ancien meneur de génie de Naples et de l’Argentine avait pourtant tenté de se muer en protecteur de la Pulga.

Messi enfin héritier de Maradona

gloire éternelle pour l'Albiceleste et Lionel Messi, jubile la presse argentine
gloire éternelle pour l’Albiceleste et Lionel Messi, jubile la presse argentine

Une apothéose de légende pour un joueur de légende: l’Argentine de Lionel Messi a remporté dimanche la Coupe du monde en battant aux tirs au but la France (3-3, 4 tab à 2), au terme de l’un des plus grands matches de football de l’histoire.

Mais à quoi cela tient-il ? Car Messi, l’un des meilleurs footballeurs de tous les temps, si ce n’est le meilleur, a pu croire que la malédiction qui le poursuivait dans le Mondial allait connaître un nouvel épisode.

Alors que les Argentins menaient 2 à 0 grâce à son penalty (23e) et un but de son lieutenant préféré Angel Di Maria (36e), l’autre star de ce Mondial, Kylian Mbappé a ramené son équipe à hauteur en quelques secondes (80e, 81e). Puis Messi a vu le Français réussir son deuxième penalty de la soirée (118e) alors que l’Argentin venait de redonner l’avantage aux siens et haranguait son public (109e).

Mais après quatre échecs depuis 2006, cette fois, c’était le soir de celui qui ravit les amoureux du ballon rond depuis si longtemps. Pour un triomphe au bout du suspense, obtenu aux tirs au but face à une équipe qui refusait de perdre. Mais a vu Kingsley Coman et Aurélien Tchouaméni échouer dans leurs tentatives, lors de cette terrible épreuve dont le gardien Emiliano Martinez a été le héros.

Cette troisième étoile pour l’Albiceleste, après celles des équipes menées par Daniel Passarella (1978) puis Diego Maradona (1986), portera la marque de Messi, immédiatement désigné meilleur joueur du tournoi, pour le plus grand bonheur de ses millions de supporteurs dans le monde entier qui ont immédiatement commencé à chanter sa gloire, de Buenos Aires au souk de Doha.

Sainte Trinité

Messi Et Albiceleste Champion Du Monde 2022 Finale Coupe Du Monde
Messi Et Albiceleste Champion Du Monde 2022 Finale Coupe Du Monde

Avant ce sacre, l’enfant de Rosario, 35 ans, avait tout gagné en clubs, avec le FC Barcelone surtout. Mais avec sa sélection, il se contentait d’une Copa America (2021). Ce titre mondial le fait rejoindre dans la légende Maradona, « el pibe de Oro », couronné en 1986. Il surpasse aussi Pelé, avec treize buts en cinq éditions de la compétition reine du football. Un trio qui ressemble fort à une Sainte Trinité pour les amoureux du ballon rond.

Messi a fait quelque chose que n’ont réussi aucun de ses deux aînés, ni personne d’autre: il a marqué en poules puis dans chacun des quatre matches à élimination directe… dont deux fois en finale.

« Nous sommes champions du monde! », a-t-il lancé au micro, extatique, avant de rassurer ses fans: « Je veux vivre quelques matches de plus » avec la sélection. « Qu’avoir de plus après ça ? Cela m’est offert quasiment à la fin de ma carrière… »

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Pour la France, qui était tenante du titre, cette dernière marche était donc celle de trop. Malgré son joyau qui a grandement contribué à faire de ce match une oeuvre d’art.

Étincelant, brillant, immense aussi, Mbappé en est à douze buts en Coupe du monde, autant que Pelé à qui il avait fallu quatre éditions pour atteindre ce total. Son triplé en finale, une première depuis Geoff Hurst (1966) qui s’est fendu d’un tweet de félicitations, lui offre un lot de piètre consolation: le titre de meilleur buteur du tournoi (huit).

Résilients, les Bleus avaient jusqu’alors surmonté de nombreux vents contraires: des forfaits en cascades de cadres, Paul Pogba, N’Golo Kanté, Presnel Kimpembe, Karim Benzema, puis un virus qui a touché l’effectif la semaine de la demi-finale et de la finale. Admirables combattants, ils ont encore cru tordre le bras au mauvais sort dimanche.

Mais la France ne deviendra pas la troisième nation à conserver le plus grand des trophées du football, comme l’avaient fait l’Italie (1934 et 1938) puis le Brésil du « roi » Pelé (1958 et 1962). Celui-ci reste aussi le seul à avoir emporté deux titres avant de fêter ses 24 ans, ce que ne réussira donc pas Kylian Mbappé.

Mais ces joueurs « ont fait rêver » les Français, a réagi leur président, venu à Doha pour la finale.

– Polémiques –

Messi Et Albiceleste Champion Du Monde 2022 Finale Coupe Du Monde 2
Messi Et Albiceleste Champion Du Monde 2022 Finale Coupe Du Monde 2

Conclue sous les yeux d’Elon Musk, cette Coupe du monde fut un tournoi à nul autre pareil, un Mondial de la démesure, nécessitant entre 200 et 300 milliards d’euros d’investissements selon les estimations. Sept des huit stades ont été bâtis pour l’occasion, le dernier entièrement rénové.

C’est aussi le premier Mondial organisé dans un endroit aussi petit, avec tous les stades dans un périmètre de 70 kilomètres.

Il est venu interrompre les saisons de football professionnel, tenu aux confins de l’automne et de l’hiver pour éviter les températures estivales insupportables de ce petit émirat gazier.

Les organisateurs ont été en butte à de nombreuses polémiques.

Il y eut d’abord les accusations de corruption pour obtenir en 2010 l’organisation de la compétition aux dépens des États-Unis, à la surprise générale. Des enquêtes judiciaires sont en cours dans plusieurs pays.

Le Qatar a également été critiqué sur la question des droits humains, notamment le traitement réservé aux travailleurs migrants d’Asie du Sud et d’Afrique. Il dément que des milliers d’entre eux aient trouvé la mort sur les chantiers du Mondial.

– Gigantisme –

LIONEL MESSI, AU FIRMAMENT2
LIONEL MESSI, AU FIRMAMENT2

Dans un entretien à l’AFP, le directeur général de l’Organisation internationale du travail (OIT), Gilbert F. Houngbo, a expliqué que le bilan exact ne serait jamais connu: « Je pense que le public a besoin de savoir la vérité et, parfois, cette vérité est de dire que, sincèrement, il n’y a pas d’information crédible. »

Il a toutefois assuré que « le Qatar (avait) mieux fait dans ce domaine que d’autres pays » et loué un « travail très positif » pour améliorer les droits sociaux à la faveur du tournoi.

Autre sujet de polémique en Occident, les droits LGBT+ dans un pays très conservateur où homosexualité et relations sexuelles hors mariage sont illégales.

Les atteintes à l’environnement consubstantielles à un tel tournoi, avec notamment l’empreinte carbone des infrastructures nécessaires, ont également été pointées du doigt.

En termes de gigantisme, le prochain Mondial s’annonce encore plus démesuré, avec trois pays organisateurs, États-Unis, Mexique et Canada, seize villes distantes de milliers de kilomètres, quatre fuseaux horaires…

Un total de 48 équipes y participeront, contre 32, soit potentiellement plus de cent matchs (contre 64 actuellement). Et sans doute donc encore plus de buts: il y en a eu 172 au Qatar, soit un de plus qu’en 1998 et 2014. Un autre record pour lequel Messi et Mbappé ont joué un rôle crucial.

Diego Maradona – Lionel Messi, La Filiation Tumultueuse

Messi enfin héritier de Maradona - Argentine championne du monde
Messi enfin héritier de Maradona – Argentine championne du monde

C’est une histoire contrastée. Avec des moments de rapprochement, de tensions et d’agacement. Diego Maradona et Lionel Messi n’ont cessé d’être liés depuis l’éclosion au plus haut niveau de la Pulga. Comment pouvait-il en être autrement ?

On parle de deux génies au même talent ballon au pied. De deux gauchers de petites tailles. De deux monstres du ballon rond venant surtout de la même terre, l’Argentine. Et étant donné la passion de ce pays fou de foot et du culte autour de Diego Maradona, il était impossible de ne pas y voir une filiation. Mais l’ambivalence des sentiments aura toujours guider leurs rapports, le plus souvent au détriment d’un Messi cible des critiques de son illustre ainé.

Dès ses premiers pas dans le monde du football, Lionel Messi a été présenté comme l’héritier du « Pibe de Oro », avec tous les espoirs que cela comporte. Et s’il a su faire fi de cette comparaison avec le FC Barcelone où Leo a tout remporté pour écrire l’histoire en décrochant six Ballons d’or, le natif de Rosario doit vivre avec l’ombre pesante de son illustre prédécesseur à chaque fois qu’il porte le maillot de l’Albiceleste. Mais un constat flagrant qui s’impose toujours : sa cote de popularité n’a jusqu’à présent jamais pu atteindre celle d’El Diez auprès de leurs compatriotes.

UN PROTECTEUR PUIS DE PLUS EN PLUS VIRULENT

le sacre de Lionel Messi +
le sacre de Lionel Messi +

Les raisons sont multiples. C’est une question de personnalités déjà. Le tranquille Messi, qui n’a jamais joué en club dans son pays natal, ne soulève pas les mêmes passions que l’ancien meneur de Naples a pu engendrer au fil de sa vie digne d’un film d’Hollywood avec ses controverses, ses excès et ce désir perpétuel de vouloir attirer l’attention.

Sur le plan du football, Messi n’a aussi pas réussi pour le moment à égaler son encombrant prédécesseur aux yeux des Argentins. Si Maradona a porté son pays sur ses épaules pour lui offrir le titre mondial de 1986 avec cinq buts, dont un doublé contre l’Angleterre en quarts de finale avec la « main de Dieu », le Catalan accumule les désillusions en sélection malgré quatre finales, à la Copa America, en 2007, 2015 et 2016, et à la Coupe du monde, en 2014.

our ne rien arranger, cela n’a pas été un long fleuve tranquille non plus entre les deux. Il y a eu des hauts et des bas perpétuels. La faute le plus souvent à des sorties pas toujours très maitrisées de Diego Maradona, amateur de punchlines derrière les micros. Si les comparaisons se sont très vite posées et que beaucoup se demandaient si Messi pouvait l’éclipser des tablettes, Diego Maradona a pourtant d’abord tenté de jouer le rôle de protecteur. Enfin pas toujours.

Quelques mois avant sa nomination à la tête de l’Argentine, il avait ainsi lancé une première pique sur Fox Sport. « Parfois, Messi joue pour Messi. Il se sent tellement supérieur qu’il oublie ses compagnons de jeu. C’est le Deportivo Messi. »

MAIS PUTAIN, IL EST ARGENTIN OU SUÉDOIS?

Revivez le match Argentine 3-3 France [t.a.b (4-2)] Finale, Coupe du monde 2022 (résumé)
Revivez le match Argentine 3-3 France [t.a.b (4-2)] Finale, Coupe du monde 2022 (résumé)

Mais une fois le costume de sélectionneur de l’Albiceleste sur le dos de 2008 à 2010, Maradona n’a eu de cesse de protéger sa star. Faisant tout pour la placer dans les meilleures conditions. Et lui donnant des conseils. Surtout, il s’est alors efforcé de ne pas attiser les discussions sur les comparaisons avec son meneur. Les années suivantes, ça a en revanche été plus mouvementé.

A coup de « Je t’aime, moi non plus » au fil des déclarations. Les premiers temps, Maradona est pourtant resté sur sa ligne protectrice. « On est très injuste avec Messi. Je demande qu’on ait confiance en lui. (…) Ce n’est pas que l’équipe le fasse mal jouer, mais elle ne lui offre pas d’options », lance-t-il dans Olé en 2011. Mais par la suite, il s’est montré plus virulent. Beaucoup plus. Avec son côté cash et sans filtre.

En 2016, Diego Maradona confie ainsi à la légende brésilienne Pelé que Messi est « une bonne personne, mais il n’a pas de personnalité. Il n’a pas la personnalité pour être un leader ».

Quelques mois avant, il avait déjà été acerbe à l’encontre de son successeur désigné, incapable de faire gagner son pays. « C’est logique de lui tomber dessus, c’est facile. On a le meilleur joueur du monde, qui peut marquer quatre buts contre la Real Sociedad, il vient ici et ne touche pas le ballon. A un moment, on se demande: mais putain, il est argentin ou suédois ? », avant lancé l’ancien sélectionneur après la finale de la Copa América 2015, perdue face au Chili.

C’EST INUTILE DE VOULOIR TRANSFORMER UN HOMME EN CAUDILLO

LIONEL MESSI, AU FIRMAMENT 2
LIONEL MESSI, AU FIRMAMENT 2

Rebelote en 2018. Quelques semaines après être monté au créneau pour le protéger (« Je lui conseille de ne plus revenir en sélection. Dans le football argentin, tout est toujours de sa faute, même une défaite de la sélection U15.

Il est vraiment temps de lui foutre la paix »), Maradona a remis une pièce dans la machine à polémiques argentine lors d’une émission mexicaine de Fox Sport avec une attaque d’une virulence rare. « C’est inutile de vouloir transformer un homme en caudillo (ndlr : chef de guerre) alors qu’il va vingt fois aux toilettes avant un match.

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Arrêtons de diviniser Messi » a-t-il glissé. Un mois plus tard, celui qui était alors l’entraîneur des Dorados Sinaloa avait rétropédalé. « Leo est un ami à moi et jamais je ne parlerais mal d’un ami », s’était-il défendu dans une interview publiée dans le journal sportif madrilène Marca, en ajoutant : « Moi, Leo, je l’adore ». Du Maradona dans le texte. Si symbolique de sa relation tumultueuse avec son « héritier ».

Plus victime qu’acteur au fil des années, Messi n’a jamais voulu alimenter le débat, se contentant le plus souvent de calmer le jeu pour ne pas rentrer dans une guerre par médias interposés avec l’idole de son pays. A l’image de son dernier hommage.

« C’est un jour triste pour tous les Argentins et pour le football. Il s’en va mais il ne s’en va pas vraiment, parce que Diego est éternel. Je reste avec tous les beaux moments vécus à ses côtés », a glissé la Pulga après l’annonce du décès de son ancien sélectionneur. Ultime symbole de cette relation « père-fils » entre génies du football argentin, pas très équilibrée.

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