Un nouveau scandale de corruption. Il s’appelle Qatargate. Quelque 600 000 euros en liquide de corruption au Parlement européen. Tout comprendre sur l’affaire de corruption qui frappe le Parlement européen. Eva Kaili a été démise de ses fonctions de vice-présidente du Parlement européen, après avoir été inculpée et écrouée dans une vaste opération anticorruption de la justice fédérale belge.
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Qatargate : tout comprendre sur l’affaire de corruption qui frappe le Parlement européen
Ce pourrait être la plus grave affaire qui ait jamais frappé le Parlement européen. Vendredi, le parquet fédéral belge a déclenché une vaste opération anticorruption impliquant le Qatar.
Parmi les quatre personnes inculpées et écrouées, l’eurodéputée grecque Eva Kaili, qui était jusqu’ici vice-présidente socialiste (S&D) du Parlement européen, au domicile de laquelle des sacs remplis d’argent liquide ont été retrouvés.
Eva Kaili a été démise de ses fonctions de vice-présidente ce mardi. Une perquisition a eu lieu lundi dans les locaux du Parlement à Bruxelles. Le Figaro vous explique tout sur ce qui est désormais appelé le «Qatargate».
Qu’a déclaré la justice belge ?
Dans un communiqué, le parquet fédéral affirme que l’enquête vise des faits de «corruption» et de «blanchiment d’argent» en bande organisée.
Un «pays du Golfe» – que la justice belge n’a pas nommé, mais identifié comme le Qatar – est soupçonné d’«influencer les décisions économiques et politiques du Parlement européen, en versant des sommes d’argent conséquentes ou en offrant des cadeaux importants à des tiers ayant une position politique et /ou stratégique significative au sein du Parlement européen».
L’opération est dirigée par le juge Michel Claise et l’Office central pour la répression de la corruption, spécialisé dans la lutte contre la grande criminalité.
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Quatre des six personnes arrêtées ont été inculpées
Sur les six personnes interpellées, quatre ont été inculpées et écrouées «pour appartenance à une organisation criminelle, blanchiment d’argent et corruption».
Francesco Giorgi, le compagnon d’Eva Kaili, a été arrêté vendredi matin. Il est l’assistant parlementaire du député S&D italien Andrea Cozzolino et l’un des principaux responsables de l’ONG «Fight impunity», fondée en 2019 par l’ancien député européen Pier-Antonio Panzeri, pour lutter contre «l’impunité pour de sérieuses violations des droits humains».
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♦ Pier-Antonio Panzeri, député de 2004 à 2019, a lui aussi été arrêté.
Francesco Giorgi est son ancien assistant parlementaire. Dans sa résidence bruxelloise, la police a découvert 600.000 euros en liquide.
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♦ Âgé de 67 ans, Panzeri est connu comme un homme de réseau très influent au Parlement.
Lors de ses précédents mandats, il a présidé la sous-commission des droits de l’homme de 2017 à 2019, ainsi que la délégation pour les relations avec les pays du Maghreb, à la tête desquels il a pris soin de placer ses proches.
Les magistrats en charge de l’enquête le soupçonnent d’être à la tête d’une vaste organisation financée par le Qatar, avec pour mission d’influer sur la politique du Parlement européen au moyen de la corruption.
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♦ Deux autres personnes ont été embarquées vendredi :
le dirigeant syndical Italien Luca Visentini, finalement laissé libre sous conditions, et le président de l’ONG No Peace Without Justice à Bruxelles, Niccolò Figà-Talamanca.
Puis c’est au tour du père d’Eva Kaili d’être interpellé, avec une valise contenant approximativement 600.000 euros, d’après le Soir.
Considérant que la situation constitue un «flagrant délit», la justice belge ordonne la perquisition de l’appartement d’Eva Kaili.
L’eurodéputée était théoriquement protégée par son immunité parlementaire, qui ne pouvait être levée qu’en cas de «flagrant délit».
La police belge y trouve des sacs remplis d’argent liquide et des cadeaux de luxe.
Démise de ses fonctions de vice-présidente du Parlement européen
«Sa position est qu’elle est innocente. Elle n’a rien à voir avec les pots-de-vin du Qatar», a toutefois déclaré son avocat Michalis Dimitrakopoulos, ce mardi, sur la chaîne privée grecque Open TV. «Je n’ai aucune idée si de l’argent a été trouvé ou combien a été trouvé», a-t-il affirmé.
Depuis, Eva Kaili a été «écartée» du Pasok-Kinal, le parti socialiste grec au Parlement européen. Ses avoirs ont été gelés lundi par l’Autorité grecque de lutte contre le blanchiment d’argent.
Dans la foulée, la présidente du Parlement Roberta Metsola l’a suspendue de ses délégations. Ce mardi, elle a finalement été démise de ses fonctions de vice-présidente du Parlement.
«Aujourd’hui, la Coupe du monde de football au Qatar est une preuve concrète de la façon dont la diplomatie sportive peut aboutir à une transformation historique d’un pays dont les réformes ont inspiré le monde arabe», avait-elle déclaré au Parlement européen le 22 novembre.
«Le Qatar est un chef de file en matière de droits du travail», avait-elle également affirmé.
Qui d’autre est concerné par cette opération anticorruption ?
Une perquisition a eu lieu ce lundi dans les locaux du Parlement européen à Bruxelles. D’autres perquisitions avaient déjà été menées auprès d’assistants parlementaires liés au groupe socialiste S&D, de fonctionnaires européens, de lobbyistes, ou d’associations.
L’ONG «Fight impunity» serait notamment concernée. «Du matériel informatique et des téléphones portables» ont notamment été saisis et feront rapidement l’objet d’analyses approfondies, a déclaré la police belge.
Les bureaux des assistants parlementaires des eurodéputés belges Marc Tarabella et Marie Arena ont été placés sous scellés. D’autres députés pourraient être dans le collimateur du parquet fédéral belge.
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«Ces allégations sont extrêmement préoccupantes. C’est une question de confiance dans les personnes au cœur de nos institutions», a réagi la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui a proposé la création d’une «autorité indépendante» sur les questions d’éthique.
Une réunion des présidents de groupes politiques a été convoquée pour évoquer cette enquête judiciaire belge dévoilée vendredi, selon deux sources au sein du Parlement européen.
La présidente du Parlement européen Roberta Metsola a par ailleurs annoncé une «enquête interne» pour que le Parlement européen se réforme.
Quel était l’objectif du Qatar ?
Pourquoi financier des opérations de corruption auprès des institutions européennes ? Le Qatar cherchait-il à protéger sa réputation, entachée par le scandale des ouvriers morts dans la construction des stades du Mondial de football ?
Il y a quelques semaines, une résolution sur les violations des droits de l’homme, à l’occasion de la préparation de la Coupe du monde, avait été débattue au Parlement européen. Eva Kaili, Marc Tarabella, Marie Arena et d’autres membres du groupe S&D avaient voté contre l’inscription de ce texte à l’ordre du jour.
De leur côté, les autorités qataries ont démenti être impliquées dans des tentatives de corruption. «Toute allégation de mauvaise conduite de la part de l’État du Qatar relève d’informations gravement erronées», a affirmé samedi un responsable du gouvernement.
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Par Kafunel
Avec Lefigaro.fr